Depuis de nombreuses années maintenant, le coaching trail en ligne est en train d’exploser aussi bien du côté de l’offre (coachs) que de la demande (athlètes). Pourquoi ? Et comment expliquer un tel emballement ?
On a décidé de mener l’enquête auprès de 3 experts du sujet qui ont fait du coaching en ligne leur activité professionnelle : Lilian Gugliero, responsable du coaching chez “Trails in France” et actuel entraîneur de Blandine L’Hirondel ; Nicolas Martin, athlète et entraîneur au sein de la structure “2EP” et Sabine Ehrstrom, entraîneure, athlète et doctoresse en science du mouvement humain.
Par Alex Violle
T.E.M : Comment expliquez-vous la situation actuelle autour du coaching en ligne ?
L.G : “Selon moi il y a 4 éléments à mettre en avant pour répondre à cette question : la démocratisation de l’accompagnement des personnes dans tous les domaines, aujourd’hui c’est moins tabou de demander de l’aide ; la multiplication des contenus et de la communication autour de l’entraînement (podcasts, presse écrite, livre, sites internet, etc…) qui mettent en avant l’intérêt d’être accompagné par un(e) professionnel(le) pour optimiser tous les paramètres de sa pratique ; la sur-sollicitation des individus dans tous les domaines de leur vie qui encourageant le fait que leurs loisirs ne doivent pas être vécus comme des contraintes, le coach peut être la solution pour l’éviter. Enfin, le mimétisme envers les athlètes élites. Le trail se professionnalise ainsi que toute l’organisation autour des athlètes dont les coachs. Les gens ont envie de “faire comme les meilleurs pour devenir la meilleure version d’eux-mêmes.”
S.E : “Les personnes qui me contactent sont principalement des pratiquant.es qui ont un emploi du temps assez chargé et qui recherchent une individualisation pour répondre au mieux à leurs attentes et conjuguer parfaitement vie de famille, vie professionnelle et vie sportive. Pour beaucoup aussi, il n’est pas possible d’aller s’entraîner en club par défaut de proximité. Et puis la tendance aujourd’hui est marquée autour de l’individualisation. Chaque personne a envie que l’on s’adapte à elle, et elle est prête à payer parfois cher pour cela.”
N.M : “Aujourd’hui, on constate que les nouveaux pratiquants qui arrivent dans la discipline ne disposent pas ou peu de connaissances et de clés pour s’entraîner eux-mêmes. Ces derniers ayant très souvent des moyens relativement importants, ils préfèrent confier, par confort, cette tâche à un professionnel dont c’est le métier. L’offre étant aujourd’hui exponentielle, il est très facile en quelques clics de trouver chaussure à son pied. Ce sera toujours moins contraignant logistiquement d’avoir un coach en ligne que de devoir se rendre dans un club, qui nécessite d’avoir du temps et de se libérer à des créneaux très précis chaque semaine.”
T.E.M : Est-ce que selon vous c’est un modèle qui va se pérenniser ?
S.E : “Je pense que c’est un modèle qui sera pérenne car on constate aujourd’hui que les gens sont prêts à accorder plus de revenus à la partie loisir dans leur vie, ce qui était moins le cas avant. Les gens sont aussi dans l’attente d’un véritable échange. Et ce contact humain est une véritable force pour pérenniser l’activité. Il est possible de créer de très belles relations même à distance car une fois la collaboration entamée, on rentre dans le quotidien de la personne, ce qui nous confère une place très particulière.”
N.M : “J’espère que oui car c’est aujourd’hui mon métier (rigole). Je pense que c’est une activité qui va rester relativement pérenne même si comme toutes activités de loisirs, cela peut être le premier écrou à sauter en cas de difficultés financières. Globalement, j’observe que les gens sont dans une logique de progression et donc dans une tendance à s’engager sur du long terme Après, la masse de pratiquants n’est pas infinie et la concurrence devient de plus en plus importante aujourd’hui chez les “coachs” donc peut-être qu’il sera difficile à terme pour tout le monde d’en vivre correctement.”
L.G : “Si l’équilibre dans la relation entraîneur / entraîné est respecté, que chacun des acteurs autour de l’athlète sait évoluer, écouter et s’adapter en laissant toujours l’athlète au centre de ses réflexions sur l’entraînement, avec une vision globale de santé / bien-être physique et psychologique, alors oui, c’est un modèle qui sera durable. Mais il faudra toujours faire attention à bien préserver cet équilibre pour éviter toutes dérives potentielles.”
T.E.M : Justement, quelles sont les dérives que vous avez pu constater au fil du temps et quelle est votre vision pour le futur de ce job ?
N.M : “Aujourd’hui, être coach ça devient une “opportunité professionnelle” où il faut arriver à se démarquer, ce qui peut parfois entraîner une “sur-marketisation” du métier et des offres de certains qui, dans les faits, ne sont pas toujours de très grande qualité. Beaucoup aussi s’improvisent coach sans en avoir les compétences. Mais les gens ne sont pas naïfs et je crois qu’ils finiront toujours par se tourner vers des coachs compétents et professionnels dans leur démarche.”
L.G : L’une des premières qui me vient c’est la “déresponsabilisation des personnes”. L’ultra contrôle de la vie des athlètes par une personne extérieure peut devenir malsain, infantilisant, générer de l’anxiété de performance et rendre dépendante la personne à son coach. L’entraîneur ne doit pas mieux connaître son athlète que l’athlète lui-même. Il doit à mon avis être un guide, un conseiller pédagogue mais ne doit en aucun décider à la place de l’athlète. Pour éviter les dérives, il doit à mon avis “accompagner” réellement et pas “faire à la place” de l’athlète.”
S.E : “Pour moi, l’une des autres grosses dérives c’est la trop grande variabilité dans les tarifs proposés. Cela va dans les deux sens : des tarifs trop bas qui vont impliquer de devoir “faire du chiffre” en prenant énormément d’athlètes et donc de baisser en qualité de prestation mais aussi des tarifs trop hauts qui ne semblent parfois pas du tout justifiés. Certaines personnes pourraient abuser d’une certaine “aura” et mettre en place une relation très verticale, le “coach sait tout” et le “coaché obéit”, je suis plutôt favorable à des relations plus horizontales où l’athlète reste acteur de ses décisions.”
Les conseils de Lilian et Sabine pour bien s’entourer
L.G : “Choisir un coach bienveillant, adaptable, à l’écoute, qui connaît et pratique la discipline à n’importe quel niveau, avec le minimum de connaissances scientifiques indispensables à la personnalisation de l’entraînement d’un athlète mais aussi à l’analyse des besoins spécifiques pour son objectif.”
S.E : “Ne pas hésiter à regarder ce qui se fait en termes de tarif et bien réfléchir au prix que l’on est prêt à mettre pour cela. L’idée n’étant pas de se ruiner même si on vous vend les meilleurs progrès du monde. Ne pas hésiter à interrompre la relation si elle ne vous convient pas. Ne pas hésiter à demander de quelles compétences et quelle légitimité dispose le possible futur entraîneur avant de s’engager financièrement.”
Où retrouver nos experts :
Sabine : (1) Facebook
Lilian : Coaching trail personnalisé – Trails in France (trails-in-france.com)
Nicolas : Facebook
novembre, 2024
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