Il y a les juniors, les seniors, et les paradoxes. Simon Gosselin court dans la dernière catégorie. Entraineur de l’une des pépinières les plus intéressantes de ces 3 dernières années (le team Sidas Matryx), athlète capable de coller Jim (Walmsley) sur un KV ou un 110K, voisin de palier du lotissement VO2 Max : et pourtant si discret. Lorsque les D’Haene n’ont plus de pain, les Gosselin appellent les Walmsley ; on fera les comptes demain puisqu’on a sortie longue ensemble. Le Beaufortain passé athlète pro en 2024 courra les 69K d’Istria 100 By UTMB, tout en suivant ses coureurs aux France de trail. Parole d’expert, en gros.
Recueilli par Julien Gilleron – Photos Simon DuguĂ©
C’est un « nouveau » Simon que nous interviewons : l’athlète qui a pris le virage pro au sein du team On. Déclic ou tentation longtemps reniée ?
Simon Gosselin : Ni l’un ni l’autre, plutĂ´t une Ă©volution logique. Après mes Ă©tudes, je me suis installĂ© en montagne, on a montĂ© la Team Matryx et je me suis lancĂ© en tant qu’indĂ©pendant…et forcĂ©ment entre les athlètes Ă coacher ou les copains que je me suis fait, tu as tout le temps du monde motivĂ© pour aller s’entrainer avec toi – et bien s’entrainer ! Tes rĂ©sultats commencent Ă suivre et la suite est une question d’opportunitĂ© : 5 ans dans la Team, 5 ans constructifs pour chacun, je pense que c’était la bonne pĂ©riode et que les choses se combinaient bien.
Quelle connexion gardes-tu avec ton métier de coach, toi que l’on a vu si impliqué dans le team Sidas Matryx ? Une énergie indispensable à ta carrière d’athlète, ou deux jobs incompatibles ?
SG : Alors il faut savoir que je me suis longtemps…mais alors TRES longtemps considéré comme coach avant d’être un éventuel athlète ! A la rigueur, je peux dire que ce regard sur moi-même a évolué, mais mon métier demeure absolument celui d’entraineur. Ma vie d’athlète reste de l’ordre du plaisir, de la passion. Bon d’accord, coach est également un job passion mais on aborde un sujet…passionnant et long. En bref, là réside la source de mon équilibre. Je ne m’imagine vraiment pas seulement courir, puis passer la journée dans le canapé à mater mon téléphone. Le plaisir d’accompagner mes athlètes est fondamental, j’y puise énormément de kiff : de l’énergie positive pure. il n’est donc pas question de commencer à envisager de douter de….non ; continuer à coacher, c’est tout simplement une évidence.
Depuis quelques saisons, Istria a pris beaucoup d’importance auprès des meilleurs mondiaux. Mais peut-on la considérer autrement qu’une séance de vitesse et un distributeur de running stones ? Eux-mêmes le disent...
SG : Je pense qu’il faut poser les choses sereinement. En elle-même, la course d’Istria ressemble à beaucoup d’autres courses, permettant à des athlètes de haut niveau de la réaliser pour préparer une autre date ailleurs. À mon avis, la plupart des élites qui s’y rendent ont cet objectif. Sauf que : elle peut fournir aux meilleurs une qualification pour l’UTMB. Ceux-ci le prennent donc en compte en établissant leur calendrier. Néanmoins j’y vois la même chose pour les non-élites : tu peux l’aborder comme une course lambda, ou privilégier l’apport des Running Stones. Personnellement, j’y vais depuis 2 ans car ça m’est super simple depuis Chambéry, et ça me permet d’accéder à un parcours vraiment similaire à mon objectif. Je sais aussi qu’il y aura quelques très bons coureurs et cet aspect reste très intéressant en course de prépa.
« Continuer Ă coacher, c’est une Ă©vidence »
Illustre-t-elle les vertus ou les failles d’un système « à points » (quel qu’il soit) ? Quelles seraient-elles d’ailleurs, selon toi ?
SG : Réponse complexe et qui mériterait là aussi beaucoup de temps…sur un sujet qui génère vite des réactions très instinctives. Je crois que cette densité athlétique quelle que soit la « réputation » de la date, est l’un des points positifs du circuit UTMB, pour ne pas le nommer. De plus, je pense qu’il ne faut pas oublier la possibilité donnée aux locaux d’aller chercher une qualification proche de chez eux. D’un autre côté, pas sûr que l’on ne pousse pas toujours trop à prendre la voiture ou l’avion juste pour aller chercher des Stones…et la machine reste énorme, au risque d’impacter les évènements plus humbles. J’ai tendance à croire que chaque coureur est différent et que tout le monde ne recherche pas un grand évènement, que les « petites » organisations peuvent donc encore attirer un public qui leur correspond.
Dans quel enchainement vient se placer Istria pour toi ?
SG : Je voulais trouver une course en fin d’hiver, exigeant de la vitesse et avec un peu de niveau, sur un profil vraiment roulant qui va ressembler Ă mon objectif de Western States. Son accessibilitĂ© en train est Ă©galement prĂ©cieuse, et je m’étais imposĂ© l’échĂ©ance de dĂ©but avril car je partirai aux US mi-avril, pour pouvoir m’y entrainer sĂ©rieusement Ă Flagstaff pendant 2 mois avec Jim (Walmsley). Ensuite, je rentrerai tranquillement courant juillet pour aborder la TDS…
Tu as largement le niveau des France. Jamais essayé, jamais été tenté… ?
SG : Je te rĂ©pondrai en deux temps. Tout d’abord, lorsque j’Ă©tais vraiment impliquĂ© dans la Team Matryx et que mon seul job c’Ă©tait d’entraĂ®ner, c’Ă©tait un Ă©vĂ©nement sur lequel j’avais Ă©normĂ©ment Ă cĹ“ur d’accompagner mes athlètes : je ne me voyais pas du tout courir « contre » eux, la question ne s’est donc jamais posĂ©e durant tout ce temps.
En m’affirmant un peu plus en tant qu’athlète ces deux dernières annĂ©es, j’y ai pensĂ© mais le calendrier ne me convient pas entièrement : la course se passe Ă la sortie de l’hiver et mĂŞme passionnante, elle ne me fait pas assez rĂŞver pour chambouler mon planning – c’est-Ă -dire courir tout l’hiver. Ce qui me plait vraiment, c’est d’adapter mon sport au grĂ© des saisons et vivant en montagne, c’est beaucoup plus logique et fun d’aller skier durant les mois blancs. J’en reviens avec une motivation dĂ©cuplĂ©e et je suis persuadĂ© que c’est lĂ que je pose la base de ma saison trail. Alors sacrifier tout cela pour ces championnats, ça reste difficile. Mais si un jour apparait un parcours plus alpin et Ă une date plus estivale, je dis clairement oui : mĂŞme s’il ne fait pas rĂŞver tout le monde, c’est un bel Ă©vĂ©nement oĂą j’irai un jour. C’est sĂ»r.
« J’irai un jour sur les France, c’est sĂ»r…. »
Parlons au Simon coach : quels seront tes athlètes, et leurs points forts sur ce parcours ?
SG : Étant donné que je laisse mes athlètes faire leurs choix, cette année je n’aurai qu’Anthony Felber. Sur les 12 que j’entraine, il n’y en a pas tant qui ont voulu cocher la case France. Il a réalisé un bel hiver en mixant ski et route, un bon temps au semi-marathon…et je pense que ce sont des qualités intéressantes à approfondir. Il est quand même toujours pas mal dans les bosses ; néanmoins le parcours n’est pas parfait à 100% pour lui car un poil trop nerveux, plein de relances, mais je le vois comme un excellent outsider. Ça va être bien cool de suivre sa course. Sur la course en montagne, j’aurai également Jules Mongellaz, 18 ans, que l’on avait vu lors des mondiaux juniors à Innsbruck.
A 28 ans, tu as déjà accompagné beaucoup de carrières différentes. Mais ton rêve à toi, quel serait-il ?
SG : …il y en aurait des choses…On va dire que j’ai encore vraiment soif d’aventure et de beaux projets : aller chercher les beaux trails par chez nous, expĂ©rimenter quelques superbes courses des Alpes – UTMB mais pas que. Passer encore de nombreuses heures avec des potes pour s’entraĂ®ner. Je n’ai pas une performance prĂ©cise qui me fait rĂŞver. J’ai plutĂ´t le dĂ©sir d’arriver Ă faire des courses accomplies sur les belles Ă©chĂ©ances europĂ©ennes.
février, 2025
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