Le 18 mai 2019, Christophe Nonorgue (voir biographie ci-dessous) a réalisé un exploit passé inaperçu.
Il s’est attaqué au record établit quelques semaines plus tôt par Benoit Girondel avec une marque à 12 870 m de D+ /D- en 22h55.
Une performance peu médiatisée mais qui a au moins retenue l’attention d’un coureur – A LIRE ICI.
Il existe très peu d’histoire, de références et de chiffres sur cette discipline singulière et anonyme.
Après quelques recherches, on trouve une première marque à 10 144 m réalisée par Jared Campbell en 2016, mais aussi une référence plus sérieuse de 2017 avec Luca Guerini qui a réalisé 12 366 m D+ / D- sur une boucle de 8.37 km pour 687m de D+ / D- (entre 650m et 1 270m) dans le cadre des 24h du Monte Prealba Up and Down.
En 2018, Enrico Viola avait effectué 15 boucles pour un cumul de 10 305m D+ / D-.
Christophe Nonorgue avait parfaitement préparé son challenge avec la précision et la rigueur Suisse ajouté d’une dose d’inconnue mais avec quand même une réflexion scientifique.
Sans avoir de certitude sur son issue il est parvenu à établir un nouveau record mondial en 24h avec 35 boucles de 386m de D+ et un aller-retour de 149m de D+, soit un total de 13 659 m de D+ / D- en 23h50.
* 2 autres coureurs ont réalisé des performances proches du record durant l’été 2019 :
=> Fernando Cancelo a tenté d’effectuer 40 allers-retours de 350m de D+/D- afin de porter la marque à 14000m les 13 et 14 juillet 2019, il a réalisé 37 allers-retours pour un total d’environ 13 000 m D+/D-.
=> Jeff Cauchon, a réalisé le 4 août 2019, 22 montées / descentes du Mont Saint Anne au Québec en 23h03m15s, l’ancien record était e 15 montes descentes consécutives. selon les calculs il aurait réalisé 129 km et 13 315 m D+/ D-.
Christophe Nonorgue revient point par point sur son exploit pour Trails Endurance Mag.
Ma motivation à tenter un record de D+ sur 24h :
En mars 2019, alors que je présentais la course du Dernier Survivant décrite ci-dessous, plusieurs personnes ont émis des doutes quant à la faisabilité du challenge. L’article paru le 9 mars 2019 sur le site de Trails Endurance Mag a animé le débat : si Benoît Girondel effectue 12 870 m de D+ en 24h, qui pourrait faire plus de 9 000 m en 12h ? Personne ?
J’ai argumenté que Benoît n’avait utilisé couru que 22h55, qu’il n’en avait peut-être pas fait un objectif prioritaire, et que la boucle du dernier Survivant était particulièrement propice pour faire du dénivelé positif et négatif rapidement.
Je me suis alors promis de tenter l’aventure pour me mesurer au record de Benoît Girondel…
Un parcours parfaitement adapté :
Le choix du parcours était donc une évidence : la boucle du Dernier Survivant.
• Altitude de départ : 640m
• Altitude au sommet : 1026m
• La montée : 1.25km / 386m D+ / pente de 32.5% (sentier le long d’un funiculaire)
• La descente : 1.98km / 386m D- / pente de 19.9%
• Parcours en forêt sur sol porteur (cailloux & terre).
Le choix d’une boucle présente un avantage sur un aller-retour : cela permet une pente différente pour la descente que pour la montée.
En montée, plus la pente est raide, plus la vitesse verticale sera rapide, mais en descente, une pente plus douce sera moins exigeante musculairement sur la durée (surtout pour un descendeur moyen comme moi !).
Conditions et déroulement de la tentative record :
Départ le samedi 18 mai à 12h. Météo idéale avec un ciel couvert, mais sans précipitations et un terrain est parfaitement sec.
Je dépose quelques affaires (ravitaillement et rechanges) au bas du parcours. Comme les boucles sont relativement courtes, je retrouverai fréquemment mes affaires, ce qui m’évite de porter mes boissons.
J’ai un planning d’accompagnants planifié pour que je ne sois jamais seul.
Je pars sur l’idée de faire des boucles en 35 minutes, puis de dériver progressivement au fil des heures pour finir en 50 minutes.
Mes premières boucles passent « toutes seules » en 32 minutes environ (21 minutes de montée, 11 minutes de descente, le temps de ravitaillement est négligeable). Mon 1er accompagnant me lâche plus vite que prévu, et j’effectue seul la 3ème boucle. C’est la seule boucle que je ferai non accompagné.
S’enchaînent ensuite les boucles et les accompagnants, comme prévu, et je prends environ 30 minutes de marge sur mon planning.
L’importance de l’entourage pour le soutien moral
À partir de 21h (9h d’effort), je peine à m’alimenter. Les temps de ravitaillement augmentent et il m’arrive de prendre jusqu’à 5-7 minutes de pause entre deux boucles. J’ai des crampes au ventre dans les descentes.
Vers 3h du matin (après15h d’effort), le ventre ne va pas mieux, le moral est au plus bas et la pluie fait son apparition. Elle m’accompagnera jusqu’à 10h, rendant le chemin de descente boueux et glissant.
J’effectue à ce moment-là mes boucles les plus lentes (28 minutes de montée, 17 minutes de descente + ravitaillement).
Comme souvent, le moral remonte et la forme revient avec le lever du jour. Des amis et des coureurs régionaux viennent à l’improviste et dans certaines boucles, nous formons un joli peloton d’une quinzaine de personnes. Je monte bien ! En 24 minutes… À peine 3 minutes de plus que dans mes 1ères boucles.
Les descentes en revanche tournent au calvaire : les muscles sont tétanisés, les articulations font mal. Je descends en 20 minutes… Presque 2x plus lentement qu’au début… À peine plus rapide qu’en montée !
À 11h36 (23h36 d’effort), je termine ma 35ème boucle. Je décide de repartir pour un bout de montée, jusqu’à un croisement avec un large chemin forestier, dont j’arriverai facilement à identifier l’altitude exacte sur les cartes. Arrivé au croisement, je fais demi-tour et retourne au point bas. J’y arrive à 11h50.
Au final, j’effectue 35 boucles de 386m de D+ et un aller-retour de 149m de D+, soit un total de 13’659m de D+, autant de D-, en 23h50.
Cela représente un kilométrage de 114.3km (35 x 3.23km + 1.3km pour le dernier aller-retour)
L’officialisation du record !
J’espère ne pas le regretter sur le long terme, mais je n’ai pas fait venir un huissier de justice afin d’ajouter un aspect officiel à ce record.
Tout d’abord parce qu’en Suisse, la notion de « huissier » n’est pas la même qu’en France. Peut-être qu’un avocat ou un notaire aurait pu remplir ce rôle, mais je n’en sais rien.
De plus, me donnant à la base moins de 3% de chance de battre le record, je ne me suis pas lancé dans de longues recherches sur le protocole précis pour une officialisation.
Et enfin, parce que même si un officiel avait été présent au départ et à l’arrivée, il ne m’aurait ni attendu et encore moins suivi durant ces 24h. Sa présence au départ et à l’arrivée ne garantit en rien que j’ai bien effectué toutes les boucles… Les données du GPS (trace, kilométrage, mais aussi, nombre de pas/min, vitesse verticale…) sont bien plus parlantes.
J’ai cependant souhaité être attentif aux aspects suivants, afin de gagner en crédibilité :
=> Vérifier précisément le kilométrage et l’altitude des points hauts/points bas à l’aide de Swiss Map, outil officiel de l’office fédéral de topographie.
=> Avoir une batterie externe sur moi afin d’éviter le mode « économie d’énergie » du GPS qui réduit considérablement sa précision. Voir les données GPS ici : http://www.movescount.com/fr/moves/move287143303
=> Courir en étant toujours accompagné. En plus d’avoir été de précieux soutiens psychologiques, mes accompagnants sont aussi les témoins de ma performance.
LE COMPTE SUUNTO => 18 mai 2019 – 23h50′ – 114,3 km.
http://www.movescount.com/fr/moves/move287143303
Biographie Express :
• Christophe Nonorgue
• Né le 16 septembre 1980 (39 ans) – vit à Neuchâtel (Suisse)
• Marié et père de 2 garçons de 8 ans
• 1.71m / 63kg
• Prof de maths et d’éducation physique.
• Sports pratiqués : tennis, VTT, planche à voile….
A débuté la course à pied en 2010.
Adepte du dépassement de soi, il a tout de suite été attiré par le trail, les gros dénivelés et les longues distances :
« En 2018, j’ai parcouru 3 500km pour 240 000 m de D+. Un ratio km/denivelé qui fait que plus la course est roulante, moins je suis performant ! J’ai obtenu mes 1ères victoires, sur des formats de 35km environ (Montreux Family, Trail de la Vallée de Joux (1er exaequo). J’ai également tenté une aventure sur de l’ultra longue distance en terminant la 1ère édition du Swisspeaks 360 (360km, 25’000m de D+) en 6 jours.
Le 4 mai, j’ai effectué 6 744m de D+ en 7h47 à l’Ultra Montée de Thollon-les-Mémises (sans D-, puisque la particularité de cette épreuve est que les descentes s’effectuent en cabines) ».
A LIRE AUSSI : Les 6 heures, un bon exercice pour s’entraîner !
Par Fred Bousseau – © Christophe Nonorgue
décembre, 2024
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