Test Sac Wise SHERPA, le sac de trail ultime ?

Vous souvenez-vous du « Slip de Shrek » ? En 2004, Eider proposait le premier gilet d’hydratation zippé, aussi novateur qu’affublé d’un injuste sobriquet. Vils concurrents ! 20 ans plus tard, la jeune firme qui monte s’appelle Wise et ponce les pentes annéciennes à coup de R&D. Ces Men In Black d’un trail raisonné prêchent une technicité-durabilité absolues et livrent leur vision du sac de trail : un Sherpa peaufiné à 280€. Cher, donc ultime ? Nous avons décortiqué.

Par Julien Gilleron

Apparence et solidité

Wise passe du côté obscur via un noir mat et profond. La micro-perforation est exploitée pour donner du brillant, les aisselles et stretchs sont confortables, tout comme le toucher parfois même rugueux sur les zones habituellement fragiles (mesh, poches bretelles). Au terme du test, point d’accroc ni de liaison défectueuse, alors que ce Sherpa reste doux comme un gilet à l’extensibilité record. Toutefois, un infime point de couture retient la poche flasque au sac, et bien que n’ayant pas constaté de fragilité, nous restons interrogatifs sur sa résistance en tant que zone la plus exposée en trail. Combien de rangement-dérangement d’une gourde en action ? Misons sur la facture et le choix des meilleurs matériaux, qui sautent aux yeux.

Taillant 

LE point central de nos interrogations. À 1.80 pour 68-70kg – plutôt répandu chez les trailers – nous oscillons entre deux tailles-deux ambiances : tantôt TRES ajusté à la limite du trop alors que porté sur un t-shirt fin ; tantôt confort mais porté sur une micropolaire, avec ou sans chargement. Or Wise propose 6 tailles, rareté à souligner. Sommes-nous si mal conçus (et non le sac) ? Pourquoi pas de serrage d’appoint ? Réponse de Guillaume Boccas, fondateur :

« Le sac a vocation à être porté parfaitement ajusté, d’où nos 6 tailles. L’appoint se fait par le stretch du sac (capacité de s’étendre d’une taille), nouveauté complète par rapport aux autres sacs du marché, qui sont rigides. Il est par ailleurs possible d’ouvrir le sac pour relâcher la tension lors des phases de montées grâce à un zip autobloquant. Il nous était plus important d’avoir un sac parfaitement fité qui ne ballote pas en descente et que l’on desserre lorsqu’on n’a pas besoin de maintien, plutôt qu’un sac mal ajusté que l’on essaie de corriger via des solutions bancales pour la descente ».

Après nous être mesurés et avoir enfilé/renfilé, nous découvrirons que nous sommes du clan des tailles 3 : prenez SURTOUT le temps de ces essais car le produit est aussi précis que la qualité de portage dépend du bon fit, et fiez-vous réellement au guide des tailles. Vous pourriez virer chafouin pour une erreur de chiffre. Sitôt expliqué, sitôt testé : cette capacité de desserrage ajoutée au stretch est en effet intéressant. Ça ne baille pas comme un soutien-gorge trop grand et le zip auto-bloque convenablement. Il fallait juste le savoir ou suivre une formation.

Découverte du “bitoniau“

Non, nous ne lisons jamais la notice en achetant un sac – comme un livre ou une fourchette, quoi. Après avoir zieuté cette languette frontale, nous avons compris son utilité, nous avons testé son utilité, et nous n’avons pas été euphorisés par son utilité : puisque le zip autobloquant fait déjà le job comme un grand. En revanche, les écouteurs y coulissent bien mieux que dans un (vulgaire) élastique de serrage.

Maintien (vous avez donc trouvé votre taille )

Pleins gazs en descente, nous avons tenté plusieurs configurations. Dos à vide, 1 smartphone + 1 banane + 1 flasque de 500m chargés du même côté ? Stabilité surprenante, ni mouvement ni déséquilibre. Dos à vide + 2 flasques frontales de 500ml remplies ? Aucun problème. 4 barres de 50g dans chaque poche frontale + une veste, 1 legging, 3 compotes de 90g, 2 flasques de 500ml, 1 flasque de 250ml dans le dos ? Le fit a parfois du être atténué par l’ouverture du zip mais sans aucun ballotement, et la descente étonne : infime oscillation, soit bien meilleure que les plus célèbres concurrents. Nous disons bien infime et oscillation. Wise affirme même avoir divisé par 4 les gigotements parasites en inclinant les flasques « de 17° » : feignants que nous sommes, nous n’avons pas mesuré l’angle mais légèrement senti leur bouchon sur les côtes. Par contre, bonheur de ne plus sentir les gourdes sur l’arête de cage thoracique, mais sur son plat. La science ne s’arrête jamais.

Volume et accessibilité

Avouons-le, quelle que soit la marque, la passion des poches frontales ne nous a jamais saisis : au trimbalement pectoral nous préférons le portage latéral. Ce Sherpa affiche néanmoins 10 à 12 litres utiles, avec 8 poches dont 2 XXL poitrine (1 litre chacune) qui séduirons les fans d’itinérance, mais aussi les trailers par leur bande silicone épaisse et leur extensibilité : c’est vaste mais même un fruit sec n’en sautille pas. Nous aurions aimé un soupçon de poche « aisselle » en plus, mais la circularité du rangement sur la périphérie du buste compense bien.

Mais alors, ces flasques nouvellement positionnés ? Wise promet maintien et ergonomie, sur ce dernier point nous restons mesurés. Assez faciles à loger-déloger de leur poche, impeccablement tenues par la 2^e (sur-)poche, nous nous sommes parfois impatientés pour passer le bouchon et l’entourer de son traditionnel élastique…non indispensable, car la gourde tient. On respire et l’on prend le coup, avant de penser à nos précieuses secondes perdues sur Jim durant la manipulation.

Quid de l’accessibilité dorsale ? Ca l’est, et même un peu mieux que chez d’autres ténors du baluchon : quelques centimètres en moins sur la poche tunnel, une coupe de biais, et c’est la luxation de l’épaule qui disparait à l’usage. Une fois de plus, Wise réussit à améliorer un marronnier du portage.

Bonus : c’est marqué sur la fiche, il y a une poche secrète. La trouverez-vous ?

Râleurs nous restons, mais instinctifs.Nous avons pesté face à la micro-ouverture de la poche dorsale mesh ; grogné face à la poche externe supérieure (pourquoi pas toute hauteur ?) avant de songer qu’elle permettait d’en extraire plus facilement une veste ; douté face aux quelques glissements latéraux de la veste rangée dans la poche tunnel, mais à l’échelle du nano-doute : il suffisait simplement de mieux la ranger. Mais un liseré silicone de chaque côté et nous aurions atteint l’Eucharistie.

En revanche, peut mieux faire pour deux mini-poches bretelles, jouant entre l’inaccessible et l’inutile. À gauche, une clef de voiture n’y rentre quasiment pas ; à droite, oubliez tout simplement la droite. Wise s’en excuse en évoquant une tentative de « poche poubelle pour emballages » et une « nette amélioration sur la nouvelle version ».

Verdict : donc Ultime, ce sac Sherpa ?

Comme Madame Duranton en 6^e, nous n’avons pas l’éloge facile. Mais nous devons reconnaitre que Wise force le respect en réussissant un produit ultra : ultra pensé, bossé, corrigé, fûté. On y voit plus des partis pris que des défauts, et des améliorations que Wise s’apprête déjà à dévoiler. En outre, rappelons que la marque cible également la randonnée courte, ou l’aventure itinérante : encore une polyvalence nouvelle sur le marché, et un Sherpa qui peut joliment matcher jusqu’à un certain niveau d’engagement. Muni du carquois Wise, vous avez même de quoi chasser.

Oui-Mais : 280 euros « utiles » ?

Le prix, encore et toujours (plus). Impossible de faire abstraction du tarif, car lui aussi dépasse la concurrence : trop c’est trop. Même si le marché s’envole ou se stabilise aux cieux, quitte à être démodés, nous estimons que nos bourses de trailers ne peuvent plus suivre. Est-il possible en 2024 d’insuffler un peu de raison au secteur ? Guillaume Boccas s’en explique :

« En général, pour connaitre le prix de revient d’un équipement de trail, il suffit de diviser son prix de vente TTC par 6. Chez Wise, nous sommes à 3. Dit autrement, si nos concurrents devaient faire notre sac ou notre veste, ils les vendraient plus de 500 ou 800 euros ! Si tout le monde s’accorde sur la nécessité de faire des produits plus responsables et « propres », dans la pratique, leur vrai prix représente 2 à 3 fois le standard habituel. Contrairement à des idées reçues, nos produits ne coûtent pas chers parce qu’ils sont éco-responsables, mais d’abord parce qu’ils sont plus techniques, exigeants, durables… et au final il s’avère que ce sont les plus propres (4 fois moins de CO2eq) et les plus responsables (Made in Local, sans obsolescence) du marché. Cela signifie aussi remettre en question les standards de qualité, accepter de consommer moins mais mieux ».