Après 2012 et 2014, François D’Haene a remporté un troisième succès sur l’UTMB. Il égale ainsi le nombre de victoire de Kilian Jornet (2008, 2009, 2011), second de l’édition 2017. Le Français livre ses premières impressions.
François, cet UTMB 2017 était considéré comme « l’Ultra-trail du siècle », compte-tenu du niveau et de la densité des adversaires ? La course est finie… Etes-vous d’accord avec cette appellation ?
Avant la course, je me disais que cela faisait plaisir aux médias… Et maintenant, je me dis que cela fait plaisir aux médias et à moi.
Cet UTMB 2017, vous l’avez emporté. Quelles sont vos premières impressions ?
Ce n’était pas évident (lâche-t-il en riant). C’est fabuleux, car cela s’est bien passé pour moi. J’ai passé la nuit avec Kilian (Jornet) et Jim (Walmsley) et ce fut très agréable. On était super content de courir ensemble et c’était intéressant de faire connaissance avec Jim. Lorsque le jour s’est levé, nous étions déjà bien fatigués et il a fallu rentrer. C’est devenu compliqué… Cette victoire, aujourd’hui, c’est moi que l’on a applaudi, mais il a beaucoup de monde derrière qui courent… Pour le public, j’ai le souvenir de 2014 (second succès de François sur l’UTMB) où il y avait énormément de gens, mais aujourd’hui, sur cette édition, il y avait la pluie, il y avait la neige et du monde partout, partout… Les gens nous sont acclamés, ils nous ont poussés, c’était vraiment fabuleux. Et à l’arrivée, je n’en parle même pas… A Chamonix, on ne voit que la partie visible, mais depuis La Flégère (8 km de l’arrivée), c’est de la folie. Je dis bravo aux organisateurs et au public. J’espère que la plupart des coureurs arriveront, ici sur Chamonix, et auront la chance d’avoir une belle arrivée. J’espère, aussi, que l’on vous a fait plaisir sur les chemins, car on s’est donné de la peine.
Vous dites que c’est devenu compliqué lorsque le jour s’est levé, lorsque la course s’est durcie… Est-ce qu’il a fallu que vous puisiez au-delà de vous aviez déjà fait sur une autre épreuve ?
Je ne m’en souviens pas (rires…) Mais c’était dur, parce que ce n’était pas forcément la bataille contre les autres. C’était surtout la bataille pour aller au bout… J’avoue que lorsque l’on a attaqué la descente du Grand Col Ferret avec Jim, on ne voyait rien, on était gelé, les jambes étaient dures et on n’arrivait pas à descendre… C’est pour cela que je suis content de ma course, aujourd’hui.
Compte-tenu du niveau de vos adversaires, est-ce l’ultra-trail le plus difficile de votre carrière ?
Tous les ultra-trails sont durs… Et je ne vois pas les concurrents comme se livrant une bagarre. Même si la course est partie très vite, car c’était une course relevée… Lorsque Jim est parti après Courmayeur, il avait de très bonnes jambes et Kilian a pris plus son temps au ravitaillement. Si ni Kilian ni moi allions chercher Jim, peut-être que nous ne l’aurions jamais revu… J’y suis allé, je l’ai rattrapé et j’ai couru avec lui. Il courrait par à coup et c’était vraiment dur pour moi. J’ai laissé beaucoup de jus. Lorsqu’il s’est arrêté (Champex, mais Jim s’est finalement classé 5e) et que Kilian n’était qu’à 6 minutes, je me suis dit que je m’étais sacrifié pour lui laisser la victoire. Du coup, j’ai géré pour rentrer au mieux, sans me soucier de ce que pouvais faire Kilian. Finalement, mes jambes sont revenues et j’ai pu garder une belle allure. L’écart se creusait et j’ai décidé de tenter ma chance, en me disant qu’il reviendrait un peu plus tard que prévu…
Justement, comment gère-t-on une fin de course, lorsque l’on a derrière soi des athlètes comme Kilian et Jim ? Physiquement, vous venez de l’expliquer, mais mentalement…
C’est assez compliqué, car ce sont des garçons qui, sur une dernière descente, peuvent me reprendre cinq minutes en étant à fond. Du coup, c’est stressant. Même avec une avance de dix minutes, eux comme moi peuvent avoir un petit coup de moins bien.
Est-ce que cette troisième victoire sur l’UTMB a une saveur particulière ?
Je pense que c’est une victoire qui aura beaucoup de résonance, car il y avait beaucoup d’athlètes, la préparation a été dure et il y avait de la pression, donc cela me fait super plaisir d’avoir été présent au rendez-vous… La première fois que j’ai fait un ultra-trail, c’était une super belle victoire (UTMB 2012) et voir que l’histoire se répète, c’est peut-être la plus belle des victoires.
Propos recueillis par Bruno POIRIER – Photo Franck Oddoux/UTMB
décembre, 2024
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