L’ultra qui se déroulait ce week-end autour de Grenoble sur les massifs du Vercors, Taillefer, Belledonne et Chartreuse a été mené de main de maître par le Français Frédéric Desplanches et la Portugaise Susana Simoes.
Pas de pitié pour les chronos 2013, tombés au chant de la compétition les uns après les autres.
Rares sont les courses où le superlatif est à ce point récurrent. La seconde édition de l’UT4M aura une nouvelle fois frappé les esprits. Par son parcours atypique – 4 massifs et 4 vallées à enchaîner –, ses estimations chronométriques pulvérisées, ses bénévoles dévoués aux traileurs jusqu’à leur chanter la sérénade, ses ravitaillements où « l’exception UT4M » s’est réalisée dans l’offre de petits plats « faits maison », sa sécurisation zélée – 8 000 fanions tous les 30 mètres en moyenne – où le coureur qui se perd ne peut que le faire exprès. Cette seconde édition se jouait cette fois en quatre dimensions, des 160 km solo et relais, 90 km solo et un nouveau 40 km, lancé comme un prélude aux autres distances.
(Lire l’actu de présentation ICI : 4 coureurs, 4 pays, 4 portraits)
Dès 8 heures du matin, vendredi 22 août, sous un soleil franc et une légère brise, 385 coureurs solo et 58 coureurs relais se lancent à l’assaut des 166 km et 10 300 mètres de dénivelé depuis le parc Mistral à Grenoble sur les boulevards striés par les voies vertes du tram. Sur le solo, la tête de course prend très rapidement un accent canadien, avec la présence remarquable de Jason Loutitt, favori de l’épreuve, qui veut marquer le bitume de son pas chantant. Loutitt part avec un objectif (trop ?) ambitieux : battre le premier relais hommes ce qui le prédispose d’emblée à soutenir une allure délirante.
« Je me suis collé à lui»
Le Canadien est réputé pour être rapide et endurant. Frédéric Desplanches en est conscient. Dès le début, le Français, venu courir sous les couleurs de l’association sportive ND2BR (ndlr : Not Dead But Bien Raide) de son fief de l’Ain, lui emboîte le pas. « Je voulais partir doucement, mais en voyant Jason partir devant, sans même réfléchir, je me suis instinctivement collé à lui. Je savais que si je le laissais partir trop loin, je ne le verrais plus. »
Après le Moucherotte, dès le second pointage à Saint-Nizier, les deux hommes ont une heure d’avance sur l’horaire estimé par l’organisation. « Avec J. Loutitt, on a bien tiré pendant les trois premières heures… Enfin, Il a bien tiré et, je l’avoue, je l’ai un peu laissé faire. A partir du 30e kilomètre, c’est devenu plus compliqué pour lui, j’en ai profité et je suis parti. »
Seul en tête.
Desplanches est alors lancé pour réaliser une course quasi parfaite, seul en tête jusqu’à la fin, prenant une avance confortable sur ses poursuivants. Au lac de Poursollet, à un peu moins de la moitié du parcours, cet habitué des longues distances entre 100 et 130 km sait que rien n’est encore joué : « C’est maintenant que ça va commencer. » Derrière, peu d’hommes peuvent prétendre défier l’Ambarrois : Rémy Marcel du team Salomon, l’Espagnol Daniel Hernando Calleja ou le Portugais Telmo Veloso. Nicolas Moyroud, 2e finisher en 2013, ne semble pas en mesure de soutenir le rythme imprimé par Desplanches. Au ravitaillement de Laffrey, le dossard n°1 ne se fait d’ailleurs aucune illusion : « Entraînement vélo depuis des mois et une seule course depuis l’Ut4M 2013 – j’ai dû me désinscrire d’un certain nombre de courses à cause de ma blessure (une tendinite du grand fessier). »
Calleja cale, Marcel passe.
Les deuxième et troisième places se dessinent à partir de Belledonne. Rémy Marcel, 13e au premier ravitaillement à Vif, revient fort en 3e position à la base vie de Rioupéroux, juste derrière Calleja. Sur les 3 km de montée qui mènent à l’Arselle, le Vizillois marque le pas sur l’Espagnol, totalement séché, assis au milieu du sentier. Calleja souffre d’une bronchite depuis quelques semaines et les 36% de pente du sentier ont raison de ses poumons et de son cardio. Telmo Veloso est sur les talons de Marcel. Dès l’Arselle, les deux hommes entament un chassé-croisé de nuit sur la traversée de Belledonne, troisième massif du parcours. Mais après le second « mur » qui mène du refuge de la Pra au sommet du Grand Colon, le Français fait la différence dans la descente jusqu’à la seconde base de vie de Saint-Nazaire-les-Eymes, distançant le Portuense de plus d’une demi-heure. F. Desplanches semble toujours inaccessible avec une heure d’avance.
Desplanches veut abandonner.
Mais quand Marcel atteint l’avant-dernier ravitaillement au Sappey, l’écart s’est réduit. Seulement 40 minutes les séparent. Il reste moins de 20 km à parcourir. Desplanches est dans le rouge. Il ne parvient plus à s’alimenter, a même parlé d’abandonner. Du Sappey à St-Eynard, Marcel réduit encore l’écart à 20 minutes. Mais ce ne sera pas suffisant, d’autant que Desplanches semble retrouver un peu d’allant. Au terme d’une remontée phénoménale, Marcel termine deuxième en 26h16min, à 12 minutes de Desplanches, qui réalise un chrono de 26h3min et améliore de 3h22min le chrono de Fabrice Arène, vainqueur de la première édition. « Il n’aurait pourtant pas fallu dix kilomètres de plus, » aura-t-il à cœur de répéter en félicitant chaudement son dauphin. Telmo Veloso termine troisième en 26h44min. Une troisième place qu’il savourera doublement en apprenant, quelques heures plus tard, la victoire de son épouse, Susana Simoes. Il faut souligner les belles performances de Marc Toubin, 9e en 2013 et 4e de cette édition, qui réalise un chrono en 27h20min soit 5h13min de moins que l’an dernier ainsi que celle de Jean-Sébastien Braun. Le marathonien des sables termine 7e de l’épreuve en 29h21min malgré un entraînement commencé trop tard et… une gastro la veille du départ
Pannes sèches.
Jason Loutitt n’aura pas relevé son défi. Malgré deux sommes à Laffrey et Rioupéroux, le Canadien explose après la fatidique montée sur le massif de Belledonne, le laissant exsangue et l’obligeant à marcher jusqu’à Freydières où il renonce à poursuivre. « Le manque d’entraînement et de courses en dénivelé, l’altitude, le déficit musculaire, l’alimentation aussi, j’ai compris que je n’étais pas prêt… Les montagnes m’ont donné une leçon. »
Même mésaventure pour Nicolas Moyroud qui, pris de terribles nausées, ne passera pas la Croix de Chamrousse et laissera partir son compagnon de route Charles Sroczynski qui termine 6e ex æquo avec Daniel Hernando Calleja en 28h8min.
UT4M 160 Relais.
Le 1er équipage, emmené par Olivier Soriano, Franck Chiarucci, Frédéric Souchon et Eric Gautier, termine en 20h6min, soit 2h25min de moins que le premier relais en 2013. Après une course au coude à coude avec l’équipe des vétérans grenoblois, les Stéphanois des « 442 » (Stéphane Dos Santos, Stéphane Aubert, Jean-Daniel Rebreyend et Sébastien Dos Santos) ont lâché au Sappey, préférant assurer leur deuxième place en terminant sans bobo à 12 minutes des premiers en 20h18min. La troisième équipe, le Royans Trail Team (Thomas Tiberghien, Nicolas Demoulin, Damien Locatelli et Michaël Gauthier) en termine deux heures plus tard en 22h19min.
UT4M 90.
Aucune surprise sur la distance avec la victoire de René-Paul Vitry. Le Réunionnais de 43 ans a parcouru les deux massifs en 11h12min. Il établit ainsi le temps de référence pour les éditions suivantes, le parcours de l’année dernière ayant été raccourci pour cause de mauvais temps. Vitry, qui se prépare pour le long du Grand Raid de la Réunion, a été surpris par le profil du parcours. « C’est une course très dure. Chez nous, dans les montées, on a des marches, on pose le pied à plat. Ici, le pied est en position flexe, les muscles sont sollicités plus durement. »
Tout au long de la course, il sera talonné par Sébastien Martinet qui l’oblige à ne jamais baisser la garde et même à forcer l’allure sur les derniers kilomètres. Martinet ne peut suivre et termine deuxième en 11h30 devant le Normand Pierre Lamy, troisième en 11h59min… 3 petites secondes devant l’Espagnol Sergio Perez.
Les femmes sur l’Ut4M
Tresses noires sous un Buff orangé, la Portugaise Susana Simoes a survolé ces 160 km en réalisant le chrono canon de 31h51min, améliorant de près de trois heures le temps de l’année dernière détenu par l’Arpajonaise Géraldine Leroy (34h43min). La deuxième place revient aux très attendues Anglaises d’Oxford, Kirsty Hewitson et Bonnie Van Wilgenburgh qui, en 34h8min de course, ne se sont jamais départies l’une de l’autre. « Nous habitons la même ville, nous nous entraînons ensemble, nous avons couru ce 160 ensemble. Bonnie est plus rapide sur le roulant. Moi, je suis plus habituée à courir de nuit. Ca crée un équilibre. Nous nous sommes à chaque fois attendues et soutenues mutuellement. » La Française Gwénaëlle Harscouët complète ce podium avec un chrono de 36h9min.
Le relais féminin est gagné en 26h3min – arrivé en même temps que Frédéric Desplanches – par l’équipe des « Bicar & Co » emmenée par Bénédicte Zerr, Clémence Fauche, Célia Chiron et Marthe Vougny. Les filles s’étaient classées deuxième l’an passé en courant à trois, sans Clémence Fauche, blessée la veille du départ. Les « Marsupilamis » (Flora Greco, Manon Dubois, Florence Joubert, Audrey Pieper) et « Les Inédites » (Alexandra Munier, Christine Dupraz, Audrey Merand, Stéphanie Schmidt) se classent deuxième et troisième en terminant respectivement en 28h26min et 28h43min.
Le 90 km a été remporté par la Rouennaise Emeline Duhamel en 14h32min. Les deuxième et troisième places reviennent à l’Américaine Amy Rusiecki, du team Innov-8, et à Laure Rebuffet qui ont couru en 14h34min et 15h24min. Seule sur le podium lors de la remise des récompenses, la Lyonnaise résumera d’une phrase le sentiment général : « Qu’est-ce que c’est dur, mais qu’est-ce qu’on aime ça ! »
UT4M 40
Hommes :
Pierre Marie Dejean, 4h36min25s
Christophe Schneider, 4h38min55s
Robin Lamothe, 4h41min26s.
Femmes :
Maela Jaouen, 6h09min55s
Florence Morisseau, 6h17min48s
Angela Laino en 6h 20mn 48s
Tous les résultats et les horaires de passage des coureurs sur le site de l’Ut4M : ICI
Par Nathalie Mathieu – ©photos N. Mathieu & T. Larret
décembre, 2024
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