Rencontre avec Romuald De Paepe à l’occasion des derniers championnats départementaux de cross-country à Crépy-en-Valois. Licencié dans l’Oise, Romuald est dorénavant habitué de ces allers-retours entre la Picardie et la région Grenobloise, sa nouvelle région d’adoption. En effet, le vice-champion de France master de trail court 2017, vit un rêve de longue date, devenir accompagnateur en moyenne montagne. Romuald se confie à nous sans concession.
Trails Endurance Mag : originaire de Picardie, une région pas vraiment connue par son relief, tu es devenu un inconditionnel de la Montagne. Raconte-nous cette rencontre avec les sommets.
Romuald De Paepe : « C’était en 2 000. Je partais pour la première fois aux Arcs en Savoie. J’allais y rencontrer par hasard, au coin d’un sentier, un certain Arnaud Fourdin (champion de France de course de montagne, vice champion d’Europe, et excellent athlète aussi sur piste et route, 13’50 au 5000m et 28’55 sur 10km), qui habitait au Touquet !
Comme quoi, on peut être montagnard, sans y habiter. Lui travaillait en été en tant que moniteur au club des sports. On est devenu ami et je suis rentré au club des sports avec lui. Pendant près de 15 ans, ce fut mon camp de base l’été. J’y trouvais tout ce que j’appréciais : un paysage de rêve, un climat sec et un calme apaisant. Par contre, je ne naviguais pas trop dans les autres massifs. Le reste de l’année, il m’arrivait d’aller dans les Vosges du côté de Gérardmer, étant donné que ce n’était qu’à 4h de chez moi. Malgré la météo capricieuse dans cette région, ce coin mérite d’être connu et les France de trail cette année furent une réussite. Ce n’est que lorsque j’ai décidé de préparer le concours d’entrée d’accompagnateur moyenne montagne que je suis allé voir ailleurs, surtout en Savoie, ayant de toute manière 40 randonnées à valider pour mon dossier d’entrée. Et je ne n’ai absolument pas été déçu. Bien au contraire. Le massif des Bauges, du côté de Chaurionde, le tour de l’aiguille de la Vanoise du côté de Pralognan, le tour de l’aiguille du grand fond pour n’en citer que quelques unes.
A chaque fois, ce fut des moments uniques. Comme on dit ici, la montagne, ça ne s’explique pas, ça se vit ! Depuis, je suis même allé voir dans les Pyrénées du côté du col de Couraduque où j’ai passé mon probatoire.
Le coin est magnifique et ne demande qu’une chose : y retourner au plus vite. »
« Il faut se donner les moyens d’y arriver » : R. De Paepe
Trails Endurance Mag : professeur des écoles aguerri, tu as pris cette année un congé de formation pour devenir accompagnateur de moyenne montagne. C’est un sacré challenge, comment parviens-tu à relever le défi ?
R.D : « Un vrai challenge en effet ! Tout d’abord, je ne pensais pas réussir à obtenir mon congé formation dès la première année. Ensuite, il fallait s’aguerrir pour réussir ce probatoire, examen d’entrée à la formation. Vu les stats des années précédentes (moins de 15% de réussites à certaines sessions), la tâche s’annonçait rude mais stimulante. Il faut juste se donner les moyens d’y arriver.
La première chose est de trouver des stages de préparation à cet examen, et j’ai eu la chance de tomber sur une structure ANTECIMES qui m’a préparé de la meilleure des façons. En plus, se retrouver au milieu de personnes vivant à la montagne et moi venant d’une vallée où le point culminant se situe à 204 m, ça me faisait sourire, mais ça me boostait encore plus. Un premier stage dans le Vercors où je me suis rendu compte qu’il allait falloir préparer le QCM (16/40 à l’examen blanc, alors qu’il faut avoir 30/40 !), travailler davantage l’orientation et appliquer une méthodologie adaptée. Une chose à ne pas se dire surtout, c’est de penser qu’en étant trailer, ça ira. Pour preuve, au début, je n’avais pas dit que je faisais de la compétition, car il fallait déjà faire ses preuves, avec une boussole et un sac de 12kg sur le dos.
Durant tout l’été, je me suis remis dans la peau d’un étudiant, en bossant tous les domaines requis pour le QCM (faune, flore, environnement, météo, législation, géologie, écologie…). En parallèle, beaucoup de lectures de cartes pour se familiariser et avoir les automatismes. Fin août, direction un second stage, toujours avec ANTECIMES, où je me sentais déjà plus confiant (35/40 au QCM) et une orientation un peu mieux maitrisée, si ce n’est une balise à l’altimètre et quelques passages à devenir fou dans les Arcosses !
Après, il me restait un mois pour réviser mes acquis de l’été et passer ce fameux probatoire. En plus, j’étais inscrit à la base en Savoie mais vu le nombre d’inscrits, j’ai été orienté en Occitanie et l’examen a eu lieu dans les Pyrénées.
Nous étions 129 au départ et la sélection s’est rapidement faite. Au final, seules 19 personnes ont réussi cet examen et j’en faisais parti. L’orientation s’est déroulée à merveille et j’avais même de l’avance aux barrières horaires, ce qui m’a permis de bien préparé les balises suivantes. Un probatoire réussi. Maintenant, place à la formation qui va durer pendant plus d’un an et demi. »
Trails Endurance Mag : ce déracinement et ce choix de formation, comment expliques-tu cette nouvelle orientation ? Est-ce une future reconversion ?
R.D : « J’ai été moniteur au club des sports aux Arcs et j’ai toujours aimé partager avec les autres ma passion ; mon côté pédagogue. Et j’avais dans le coin de ma tête, l’idée de préparer ce diplôme. Après, j’avoue que la demande de congé formation s’est faite comme un coup de tête.
Reconversion ! N’allons pas jusqu’à dire cela. Même si on ne sait jamais. En tout cas, je veux mener ma formation à son terme. Auparavant, il y aura de nombreux stages à mettre en place avec la structure ANTECIMES qui a aimé mon profil et qui m’a proposé t’intégrer leur équipe. De nombreux projets m’attendent, entre des stages, des recos de course, des tours du Mont Blanc sur plusieurs jours… De plus, mon club Nogent sur Oise (antenne de l’EOA) envisage de monter aussi une structure dans ce domaine, ce qui pourrait élargir les possibilités.
Concernant mon métier d’enseignant, il m’amènera là où il voudra ! (rires). »
Romulad De Paepe : « objectif, France de Trail 2018 »
Trails Endurance Mag : comment vis-tu ce phénomène de mode autour du trail ? Existe-t-il des différences de cette tendance entre ta région d’origine et ta région d’adoption ?
R.D : « Ce phénomène est normal quand de nouvelles « choses » apparaissent. Les gens s’y intéressent, commencent à y trouver de l’engouement et après tout le monde y va. Je ne fais du trail que depuis 8 ans et ça a beaucoup changé. Par exemple, désormais, pour s’inscrire à une grosse course, il faut s’y prendre en avance, sous peine de se contenter de la regarder sur le web ou les réseaux sociaux en direct (rires).
En tout cas, on retrouve dans cet univers trail, cette bulle comme dirait Olivier Gui. C’est ce partage autour d’une passion commune : les sentiers. Et j’insiste bien sur cette notion de sentiers, plutôt que de dire la montagne. Car en effet, au delà des spécificités de chaque épreuve ou région, le trail est avant tout une course nature. Les pseudos polémiques sur la définition du trail me font plutôt rire. N’empêche ! Courir une épreuve de l’UTMB (à mon goût roulante au niveau du sol rencontré), le Trail de la Côte d’Opale, les Templiers ou les France de trail à Gérardmer, ça reste du trail à son sens premier. En tout cas, j’ai souvent entendu des montagnards dire après le TCO : « Hé ben, c’est vraiment dur comme épreuve ! »
Concernant ma région, effectivement, le phénomène est un peu différent. Il y a de belles organisations comme la Champaisne. On y retrouve des valeurs que je partage.
Par contre, par chez nous, il faut avouer, c’est relativement plat… et donc en contrepartie, il faut courir, et plutôt vite… »
Trails Endurance Mag : Pour les observateurs, il est difficile de te définir en tant que coureur. Excellent trailer, excellent crossman, as-tu amorcé une métamorphose en vivant près des massifs ?
R.D : « Disons sportif alors (rires) ou non sédentaire !
Et encore, j’aimerais faire un marathon, refaire un peu de piste, tenter même un autre sport…En tout cas, j’aime ces efforts, même si ceux qui me connaissent très bien disent souvent que je ne me donne pas suffisamment. Et malgré le fait que je sois expatrié à la montagne cette année, je ne change pas mes habitudes : cross l’hiver, malgré quelques soucis musculaires, car c’est la discipline que j’affectionne. »
Trails Endurance Mag : quels sont tes prochains objectifs sportifs à court et moyen termes ?
R.D : « Le France de trail en juillet demeure mon objectif. Un parcours typé montagne qui tombe pour une fois en début d’été. Après, j’envisage quelques épreuves nationales, en fonction du calendrier et de ma formation. Il y a tellement d’épreuves qui me font envie. En août, j’ai peut-être l’intention de faire un autre type d’épreuve… joker !
A moyen terme, une épreuve à l’étranger comme Zégama ou Sierre-Zinal me tente aussi. J’ai aussi un projet qui me trotte en tête : mettre en place un projet au Kenya pour aller à la rencontre des coureurs des hauts plateaux et aller dans les écoles pour leur apporter du matériel. Pour cela, il me faudra trouver des partenariats et monter une équipe. »
Par Xavier Boulanger – ©Fred Poirier & Fabien Lefort
décembre, 2024
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