Vous êtes ambitieux, déterminé ? C’est bien. Mais comme le dit un proverbe berbère, « Si vous ne savez pas où vous allez, vous risquez de mettre un certain temps pour y arriver « . Voyons comment détermine run objectif en fonction de ses compétences.
Savoir déterminer un objectif est la base de la performance et la condition d’une estime de soi stable. La motivation, la détermination, l’engagement dans un projet dépendent directement de la qualité de nos objectifs. Une fois déterminé, l’objectif permet de seprojeter, de programmer mais également de le partager et de créer une dynamique autour de ce projet. L’objectif sportif prend forme dans les rêves, rêve d’accomplissement et de performance. Pour passer du rêve à la réalité, il faut être motivé. La motivation, sa constance, est dépendante de la qualité de son objectif. Les sportifs qui établissent des objectifs précis réussissent mieux que les autres (Burton, 1992).
Comment construire un objectif ?
Un objectif est personnel. Il répond à nos attentes et est en adéquation avec nos capacités. Nous avons des références, peut-être même des idoles, qui vont nous inspirer mais chercher à les copier est une erreur. La stratégie se définit en considérant ses propres possibilités : physique, psychique, financière, temporelle, environnementale… La meilleure façon de ne pas l’atteindre est de négliger certains facteurs, directs ou indirects. Si l’objectif est mal évalué, les épisodes de doute, de blessure physique et psychologique, de perte de motivation se succèdent.
Avoir un objectif de maîtrise est plus important qu’il n’y paraît. Il sera fonction de nos capacités réelles, celles que nous possédons dans l’instant présent , et de nos envies, nos aspirations. Il nous rend autonome. Il peut être orienté sur le temps, la gestuelle, la technique, la stratégie, le comportement, les sensations… Tout ce qui dépend que de nous.
Un objectif de résultat est anxiogène. Il n’est pas objectif, mais subjectif. Il ne dépend pas seulement de notre prestation mais aussi de celle des autres. Or n’ayant que très peu d’influence sur la prestation des autres, elle ne peut être considérée comme un critère fiable. Pourtant, de nombreux coureurs visent un résultat, un classement. Une semaine avant l’épreuve, ce coureur devient nerveux et fait vivre un enfer à tout son entourage. Quand le départ est donné, il n’est jamais centré sur sa course mais son attention est absorbée par ses concurrents. Quelque soit le résultat, il n’est jamais satisfait. Il expose ses excuses. Alors, à chaque course, il se fustige et, pour compenser son échec, il fixe un résultat encore plus ambitieux. Il court de frustration en frustration et ancre en lui « l’échec ». Ce cercle vicieux se renforce à chaque prise de dossard.
Les coureurs qui ont un objectif de maîtrise gagnent plus que ceux qui cherchent un résultat. Prenons un cas concret : Anthony souhaite faire un top 10 sur le Grand Raid de La Réunion. C’est un bel objectif… de résultat. Il avoue avoir du mal à se surpasser en fin d’épreuve. Difficile de se dépasser quand l’attention est focalisée sur un classement ! Si Anthony accuse un coup de fatigue, le top 10 peut lui sembler inatteignable. Si la course s’emballe, que faire ? Suivre le rythme pour rester a proximité des premiers? Et s’il se retrouve 10ème, comment se motiver avec la fatigue pour aller chercher le 9ème ? Anthony terminera 6ème simplement en ayant accepté de requalifier son objectif. Exit le classement. Son attention est focalisée sur ses sensations, sur sa capacité à agir sur son rythme. Avec quelques outils élaborés en séance de préparation mentale, il maîtrise parfaitement son sujet, lui-même, le seul sujet sur lequel il peut agir en course.
Les dix commandements de l’objectif sportif
1/ La Clarté
La réalisation de l’objectif ne dépend que de nous. Nous pouvons agir sur lui de manière autonome et concrète. Clarifier ses comportements, ses émotions et même ses pensées, c’est assurer la sérénité et la longévité.
2/ L’Ambition
C’est la saveur de l’objectif qui va entretenir notre motivation. L’ambition permet de nous projeter dans un soi idéalisé, celui placé au sommet de son estime de soi. Nous nourrissons tous une ambition personnelle. Elle mérite d’être posée et assumée.
3/ Le Réalisme
L’objectif est établi en fonction de nos possibilités réelles et actuelles. L’exercice nécessite une conscience de ses possibilités en écartant les considérations hasardeuses. Cette conscience nous permet de nous ancrer dans le réel. Ignorer la blessure en espérant un miracle, négliger les temps de récupération qui font partie intégrante de la progression, sont des leurres. La volonté ne pourra rien pour nous. Sauf, bien sûr, si notre objectif est un objectif d’autodestruction !
4/ L’écologie
Le coureur de montagne est avant tout un être humain qui vit en société. L’objectif visé et respectueux de l’équilibre : familial, professionnel, physique et psychique. Il est établi en fonction des moyens que nous pouvons y dédier dans la globalité de nos investissements. L’objectif est partagé et fédérateur.
5/ Le temps
La notion de temps est essentielle. Combien de temps pour atteindre mon objectif ? Cela va nous permettre de nous projeter, de programmer la préparation. Evaluer notre temps de course permet de programmer nos ravitaillements, notre assistance éventuelle et de visualiser l’épreuve. À l’échelle d’une vie sportive, on distingue les objectifs à court, moyen, long terme. Dans une saison sportive, on établit les périodes de préparation, d’affûtage, de compétition, de régénération.
6/ La Formulation
Un objectif ne connait pas le « si » ni le « à moins que ». Une fois exprimé, il est clair pour tous. Il est simple, positif et inconditionnel pour nous, comme pour ceux impliqués directement ou indirectement. Dans ces conditions, notre projet sera en capacité de stimuler l’ensemble de nos forces conscientes et inconscientes.
7/ L’évaluation
Une batterie d’échelles de mesures fiables permet d’évaluer où nous en sommes. L’auto-évaluation est essentielle pour vérifier que nous tenons le cap. En plus des valeurs classiques exprimées en Km, D+, FC, %,… nous pouvons évaluer l’envie, la motivation, la fatigue, la qualité du sommeil, les humeurs… Ces évaluations diverses et répétées sont essentielles au critère suivant.
8/ L’Adaptation
Entre la définition de l’objectif et sa réalisation, il y a souvent, pour ne pas dire toujours, des imprévus. Nous devons nous adapter, composer avec les aléas. Malgré le soin apporté à l’objectif, il y a toujours une différence entre ce que nous avions imaginé et ce que nous vivons. Chaque changement est un nouveau point de départ à part entière.
9/ La Récompense
Cette notion de récompense est importante, elle stimule notre motivation. C’est elle encore qui nous fournira l’énergie, la capacité de se projeter dans l’objectif suivant. Nous sommes ainsi faits. Nous investissons, nous nous investissons pour obtenir une récompense. Elle doit avoir du sens de manière personnelle et intime. La récompense est le centre de la cible. Au plus il est précisément défini, au plus nous sommes en capacité de trouver les ressources pour l’atteindre.
10/ L’Après
Un objectif n’est pas une fin en soi, il doit y avoir un après. Certains sportifs ne parviennent pas à réaliser leurs objectifs. Pourtant, l’objectif est bien programmé. Mais juste avant de réussir, de manière inconsciente, ils refusent de l’achever. La nature a horreur du vide. Lorsqu’on se consacre à sa tâche pendant de longs mois de préparation, l’atteinte de l’objectif est parfois vécue comme une petite mort.
L’objectif spontané
Surpris par une question, on formule une réponse, sans réflexion… qui comble un vide, celui laissé par la non détermination de l’objectif. Souvenir d’un échec programmé. Exemple : quelques jours avant le Grand Raid de La Réunion 2016, j’ouvre le journal régional. Freddy, l’espoir local est en grande forme et déclare que son objectif est de ne pas lâcher François. Le jour de la course, au bout de 60 kilomètres, François accélère et dépose le petit groupe qui court avec lui. Notre espoir s’accroche puis décroche et se retrouve sans objectif précis. Il abandonne dans l’heure qui suit. Antoine, notre métronome national, était décroché de la tête de course depuis longtemps mais lui poursuit un objectif précis basé sur ses capacités. Focalisé sur ses prévisions, il remonte les concurrents et reprend même du temps sur François dans les derniers kilomètres. Antoine a un objectif de maîtrise, de processus. Freddy a un objectif spontané. En lisant sa propre déclaration dans le journal, il a inconsciemment ancré en lui la mission de suivre François, en toute loyauté, conformément à l’objectif rendu public ! Observez, écoutez, lisez les déclarations et regardez les résultats. Vous comprendrez l’importance d’établir un objectif de maîtrise.
Tout cela est bien compliqué, non ? Bien moins que s’enfermer dans une succession d’échecs. Les exemples d’échecs dus à des objectifs inexistants, flous, utopistes, tournés vers l’égo sont courants dans tous les sports. En préparation mentale, chez le sportif expérimenté, le chemin le plus long n’est pas la construction de l’objectif mais la déconstruction d’un système défaillant. Le constat de départ est souvent une démotivation, une estime de soi en souffrance, un sentiment de culpabilité, parfois même un burn-out. En entretien, les objectifs négligés ne tardent pas à pointer le bout de leur nez ! Une fois tout cela bien étalé, nous pouvons reconstruire la pyramide de la performance. En complément de la méthode, un travail de visualisation permet de vérifier que l’objectif est stimulant, réaliste et procure des émotions positives.
Pour conclure, je vous pose une question : Pouvez-vous exprimer votre objectif en une phrase simple ? Formulée à la première personne ? Sans négation ? Qui comprend une action personnelle ? Déterminée dans le temps ?
Si oui, alors vous êtes sur la bonne trajectoire !
Par Pascal Blanc, athlète, préparateur mental – Photo : Franck Oddoux
décembre, 2024
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