Après seulement trois épisodes, et quatre si on ne retient uniquement que l’Altispeed, l’Ice Trail Tarentaise (ITT) Mizuno, concouru à Val-d’Isère, s’est imposé comme l’un des rendez-vous phare du trail international. La qualité des forces en présence, qui d’ailleurs n’ont jamais été aussi relevées cette année, est là pour l’attester. Sans oublier l’engouement populaire qui ne s’est jamais démenti au fil des éditions, le millier de places disponibles partant comme des petits pains. Au demeurant, la participation aurait pu être autrement plus importante encore si les possibilités d’inscription avaient été élargies. Hélas, ce ne sera jamais le cas en raison d’un parcours oh combien sélectif qui pénètre au cœur de la haute montagne (1) avec l’ascension désormais mythique de la Grande Motte, perchée à 3653m, faisant ainsi de l’ITT la plus haute course nature du continent européen. Autre donnée rédhibitoire à une affluence plus conséquente, la visite que rend le parcours au sanctuaire du Parc National de la Vanoise, le premier à avoir vu le jour en France en 1963, pourvu d’une réglementation draconienne.
=> Laurent Vinner en pionnier
Si cette manifestation a pu gagner ses lettres de noblesse, on le doit principalement à la personnalité de Laurent Vinner, à la fois intrépide et visionnaire. En effet, bien épaulé par un ami réserviste en la personne de Grégory Henry, accompagnateur en montagne à La Rosière, il n’aura pas hésité à remuer ciel et terre pour convaincre un à un les différents décideurs et autres lobbies de la pertinence d’un trail au cœur de la Haute-Tarentaise. Assurément, quelqu’un d’intrépide au regard de la position adoptée par ses interlocuteurs à l’égard de son dessein, confinant par-ci à l’indifférence, par là à l’apathie, quand ce n’est pas la franche hostilité.
Oui, quelqu’un qui n’a pas froid aux yeux par rapport à la cascade d’échecs jalonnant l’histoire du trail dans les lointaines et enclavées vallées intra-alpines, à l’instar de la Tarentaise.
Mais Laurent n’est pas seulement intrépide, il est aussi visionnaire. Devant la profusion de trails qui ne cessent d’engorger le calendrier, il refuse en effet d’élaborer un ersatz à l’espérance de vie éphémère, oui une pâle copie dénuée d’imagination et de sensations fortes.
=> Aux confins de l’alpinisme
Au contraire, il veut se singulariser et recherche en conséquence l’élément catalyseur, l’étincelle capable d’engendrer à sa course une aura particulière, et ainsi en faire un événement incontournable et pérenne. Son coup d’éclat, ce sera bien sûr ce fabuleux parcours de 65km accusant un différentiel de 5000m qu’il va imaginer puis finaliser pour devenir la pierre angulaire, la vitrine de son rendez-vous.
Un parcours à nul autre pareil, frisant l’irrationnel, effleurant la voûte céleste à la Grande Motte, faisant ainsi transplanter les skyrunners dans un milieu qu’ils ignorent ou fréquentent rarement : celui, magique, de la haute montagne. Alors que l’UTMB® culmine à 2516m au Col de la Seigne, ils progressent ici presque continuellement au-dessus des 2500m. A deux reprises, ils s’aventurent même au-delà de la barrière fatidique des 3000m (Grande Motte donc mais également Aiguille Pers à 3386m), puis s’approchent par trois fois de ces mêmes 3000m (Col de la Rocheure à 2911, Col des Fours à 2976, tunnel des Lessières à 2960). D’autre part, ils évoluent sur pas moins de deux glaciers, ceux de la Grande Motte et du Grand Pisaillas.
=> Récompenses
De son action entamée en 2010, Laurent en récoltera très vite les fruits. Après avoir essuyé le refus de Bourg-Saint-Maurice puis de Tignes, il obtenait l’assentiment de Val-d’Isère pour mettre son projet sur orbite. Une première victoire qui allait en appeler d’autres, tout aussi retentissantes, témoignant ainsi de la force de persuasion de cet ancien chasseur alpin du 7ème Bataillon de Bourg-Saint-Maurice, né le 20 mars 1974 à Arras, en terre pas-de-calaisienne. Opposé initialement à l’ITT, le Parc National de la Vanoise, après une âpre bataille d’arguments, se laissera convaincre que protection des écosystèmes et trail ne sont pas incompatibles. Le 7 juillet 2011, son conseil d’administration, après avoir modifié la réglementation de cet espace naturel d’exception, donnera le feu vert à la manifestation, soit dix jours seulement avant le baptême du feu. Un galop d’essai qui drainera quelques 437 trailers dont 331 partants sur le seul Altispeed (32km pour 2500m de dénivelée), le 65km étant annulé en raison de méchantes intempéries (limite pluie-neige à 2500-2700m, reliefs obstrués et balayés par de violentes rafales de vent). Une participation très encourageante qui convaincra le Ch’ti à poursuivre l’aventure.
En 2012, il palliera l’absence de subvention émanant de la mairie (2) en dénichant un partenaire à la solide notoriété, en l’occurrence Lafuma. In fine, l’intervention de la marque drômoise se révélera décisive, permettant la tenue du second millésime qui comptabilisera quelques 379 finishers (144 sur l’ITT, 235 sur l’Altispeed). Lafuma faisant défection afin de chapeauter la SaintéLyon, le chantre de l’ITT devra prendre de nouveau son bâton de pèlerin pour dégoter à l’heure de la crise l’oiseau rare. Sans égal pour flairer les bons coups, extrêmement réactif lorsque le sort s’acharne contre lui, il fera venir en mars 2013 un partenaire encore plus prestigieux : le Japonais Mizuno, toujours en place à l’heure actuelle, qui marque ainsi son attachement à certaines valeurs montagnardes véhiculées par l’ITT, en particulier le dépassement de soi, la solidarité et le respect de l’environnement.
=> Pléiade de stars
Auparavant, précisément le 30 novembre 2012, Laurent aura réussi le coup de génie d’intégrer son rendez-vous dans la fameuse Skyrunner® World Series UltraSkyMarathon, justifiant son choix : « Disons-le clairement, il s’agit de séduire le cercle élitaire des skyrunners qui n’ont pas d’équivalent au monde sur le plan de la performance en course et trail de montagne ».
Les retombées ne se firent pas attendre. Disputé le 14 juillet 2013 à guichets fermés (voir actu et photos de 2013 ICI), le 3ème opus verra, sur un parcours en grande partie enneigé, plusieurs étoiles du Skyrunning s’illustrer. A l’image de l’invincible lauréat espagnol Kilian Jornet Burgada et de son talentueux dauphin savoyard François D’Haene, auteur tous les deux d’un mano a mano d’anthologie, ce dernier, lâché dans la dégringolade finale, ne concédant que 4’41. Alors que D’Haene bouclait la cuvée 2012 en 8h16’35, l’icône Jornet pulvérisera le record de l’épreuve en 7h35’32. Quant à la marche restante du podium, elle sera occupée par l’Allemand Philip Reiter.
La gent féminine ne sera pas en reste, la victoire revenant haut la main à la Suèdoise Emelie Tina Forsberg, les deux autres récipiendaires apparaissant sous les traits de la Haut-Savoyarde Christel Dewalle, 2ème, et de l’Italienne Francesca Canepa, 3ème. On relèvera encore la présence du Transalpin Fulvio Dapit, 4ème, de l’Américain Ricky Gates, 9ème, de la Néo-Zélandaise Anna Frost, 4ème, enfin de l’Australienne Beth Cardelli, victorieuse de l’Altispeed. Insatiable, Laurent fera encore bouger les lignes en incorporant cette saison l’ITT dans l’inédit Salomon Skyrunner France series, digne héritier du circuit national de trail Salomon, porté sur les fonts baptismaux par Jean-Michel Faure-Vincent, lui aussi jamais avare d’imagination. Un ITT qui demeure plus que jamais l’une des étapes reines du Skyrunner® World Series Ultra.
=> Conditions météorologiques et parcours :
De toute évidence, le parcours de l’Ice Trail Tarentaise (ITT) Mizuno – Val-d’Isère s’avère en tous points somptueux à condition toutefois que la météo ne fasse pas des siennes ! Même si Laurent Vinner a très vite intériorisé l’extrême complexité de faire partir chaque année le peloton à l’assaut de la Grande Motte, étant donné les impondérables, omniprésents à cette altitude : enneigement, vent, température (15° d’écart avec Val-d’Isère situé 1800m plus bas). A vrai dire, la météo exécrable de l’édition princeps de 2011 lui donnera amplement raison, le contraignant à reverser les concurrents de l’ITT sur l’Altispeed. Il faudra d’ailleurs attendre 2013 pour voir enfin la compétition parvenir à son toit, l’arête terminale étant interdite lors du cru 2012.
N’empêche, il emploie tous les moyens qu’il a à sa disposition pour permettre à sa manifestation de côtoyer les cieux. En amont du jour J, une semaine de préparation est ainsi accomplie d’arrache-pied par une équipe d’une vingtaine de personnes afin de tracer et d’équiper l’intégralité du parcours.
Pour ce 4ème millésime, en raison de mauvaises conditions atmosphériques, ce travail de titan n’a toujours pas été effectué sur le glacier de la Grande Motte. Il devrait l’être ce vendredi et ce samedi. Raison pour laquelle Laurent se montre relativement confiant de voir l’ITT emprunter le glacier, d’autant plus que le secteur est facilement accessible aux secours de par la présence des pistes. S’il exclut de voir les skyrunners fouler le sommet, il escompte bien en revanche qu’ils parviendront au pied de l’arête finale, à 70m de dénivelée du faîte, sinon il se contentera de la gare supérieure du téléphérique (3456m) ou bien celle du funiculaire (3032m).
En revanche, excepté l’arête conduisant à l’Aiguille Pers qui sera sécurisée samedi, tout le reste de l’itinéraire a été balisé. Y compris les deux délicates portions que sont le hors sentier descendant joignant la gare supérieure du funiculaire au vallon de la Leisse ainsi que le Col de la Rocheure qui en cas de brouillard serait évité, étant trop éloigné des secours. Dans ce cas, le peloton, arrivé au chalet du Charvet en provenance de la Grande Motte, redescendrait au Manchet avant d’avaler le Col des Fours par le refuge du Fond des Fours.
De toute façon, le tracé définitif sera décidé au dernier moment suivant les indications divulguées par les ouvreurs. Huit parcours de repli préétablis ou décidés durant l’épreuve pourront alors être utilisés. Et pas moins de 102 bénévoles, sans compter les professionnels avertis (guides de haute montagne, pisteurs-secouristes) seront mobilisés pour veiller au grain.
MÉTÉO DE VAL D’ISÈRE ICI
Par François Vanlaton
(1) Avant l’apparition de l’Ice Trail Tarentaise, seules deux épreuves partiront à la découverte de la haute montagne en France : la 6000D depuis 1990, enfin les Deux Alpes Raidlight Trail en 2010-2011.
(2) La commune de Val-d’Isère avait justifié son retrait en 2012 par un important manque à gagner dû à l’annulation, pour faible enneigement, des quatre épreuves de la Coupe du Monde de ski alpin prévues sur son territoire les 10 et 11 décembre 2011.
=> UNE CONSTELLATION D’ETOILES !
65km :
L’issue demeure très incertaine. Elle sera marquée par le formidable duel opposant le Savoyard François D’Haene (Team Adidas) à l’Espagnol Luis Alberto Hernando Alzaga (Team Adidas). En vérité, cette joute constituera un remake de leur passionnant mano a mano qui a émaillé le 80km du Mont-Blanc, disputé le 27 juin dernier dans le cadre du Skyrunning World Championships UltraSkyMarathon® (lire actu 80km du Mont Blanc 2014 ICI).
Chez les dames Emelie Forsberg sera la grande favorite avec Maud Gobert et Stéphanie Duc pour lui contester la victoire.
ANALYSE COMPLÈTE ET DÉTAILLÉE DES FAVORIS DES 2 COURSES ICI
=> UN PROGRAMME ALLECHANT :
Ce dimanche 13 juillet verra successivement le départ des épreuves suivantes dans le centre de Val-d’Isère :
– L’Ice Trail Tarentaise (trail long de 65km pour 5000m de dénivelée) : 4h.
– L’Altispeed (trail court de 32km pour 2500m de dénivelée) : 8h30.
– La Montagnarde (randonnée de 12,5km pour 1400m de dénivelée) : 7h.
A l’image de l’an passé, les enfants ne seront pas oubliés et auront droit aussi à leur trail qui aura lieu le samedi 12 juillet à 14h45 :
– Parcours rouge pour les catégories 7-9 ans et 10-11 ans (1,5km pour 62m de dénivelée).
– Parcours bleu pour les catégories 12-13 ans et 14-15 ans (2,5km pour 150m de dénivelée).
=>DE MULTIPLES CHALLENGES ET PARRAINS :
En premier lieu, l’Ice Trail Tarentaise (ITT) Mizuno – Val-d’Isère est partie prenante dans l’illustre Skyrunner® World Series Ultra, le 65km servant de support à la seconde manche. Le 10 mai dernier, la Transvulcania, concourue sur l’île de La Palma dans les Canaries, avait ouvert le bal de ce challenge international totalisant, comme à l’accoutumée, cinq manches.
Ensuite, l’épreuve reine est retenue comme 3ème étape masculine du nouveau Salomon Skyrunner France Series tandis que l’Altispeed engrangera des points, toujours comme 3ème étape, pour les classements femme et espoir de ce circuit national comprenant en tout et pour tout cinq manches. A l’heure actuelle, Michel Lanne mène la danse devant Nicolas Martin, 2ème, et Arnaud Perrignon 3ème, qui seront pourtant absents tous les trois. Chez les filles, c’est Anne-Lise Rousset qui caracole en tête devant sa dauphine Juliette Bénédicto puis Virginie Govignon. Contrairement à leurs alter égo masculins, aussi bien Anne-Lise que Virginie, toutes deux coéquipières dans le Team Race Land, galvaniseront le 32km qu’avait enlevé cette dernière en 2011.
Enfin, deux autres challenges marquent de leur empreinte le rendez-vous avalin :
- Le 2ème Challenge Ski-Alpinisme – Trail Monnet, associant la Montée du Linga Vertical 1000 (4,380km), disputé à Châtel dans le Val d’Abondance, avec le 65km ou le 32km.
- Le 3ème Extrême Trails Challenge Le Défi des Savoie, associant le 64km ou le 38km des Trails de la Vallée du Brevon, concourus à Bellevaux dans les Alpes du Léman, avec le 65km ou le 32km.
Parrain l’an dernier, le Savoyard François D’Haene, qui s’alignera sur le 65km pour la troisième année consécutive, endosse de nouveau cette responsabilité qu’il honore avec la conscience d’un véritable professionnel. Deux autres personnalités l’accompagneront dans cette tâche : les Haut-Savoyards Christel Dewalle et Adrien Piccot qui prendront le départ du 32km.
François Vanlaton – ©Photos Fred Bousseau
octobre, 2024
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