Vainqueur de l’UTMB en 2012 dans des conditions dantesques, lauréat de la Diagonale des Fous à l’automne 2013, François D’Haene s’était fixé un nouveau challenge en début d’année : enchaîner ces deux ultras de 160 km en un mois et demi. Nous y voilà pour celui qui a changé de dimension médiatique depuis son second succès en 2013 à l’UTMB® (lire la news d’après course avec photos, réactions et résultats ICI), et qui devrait probablement s’adjuger le premier titre de l’Ultra Trail World Tour (UTWT) – A lire ICI.
Le défi de l’enchaînement UTMB-Diagonale des Fous
François D’Haene éprouve le sempiternel besoin de casser les habitudes. Ne pas rester sur les mêmes schémas saison après saison, se renouveler pour conserver ce surcroît d’envie qui fait la différence dans les moments décisifs. Vainqueur de l’UTMB® en 2012 et de la Diagonale des Fous en octobre 2013 (lire la news ICI avec photos), il a par conséquent pimenté son programme 2014, en inscrivant à son calendrier ces deux ultras de plus de 160 bornes, à peine séparés d’un mois et demi. « Le challenge fixé en début d’année n’est pas forcément de vouloir gagner les deux. Ce que je recherchais, c’était challenger mon corps : voir si je pouvais les enchaîner en arrivant à pas trop se blesser, à garder l’envie, à les courir assez vite en gardant le plaisir. Entre mon plein du temps familial, social etc…, c’est le challenge qui me faisait le plus envie, qui me paraissait le plus réalisable et le plus logique. J’ai besoin de choses nouvelles. Le fait d’enchaîner les deux, ça me permettait d’aborder différemment ce que j’avais fait par le passé » explique François D’Haene, jeune papa depuis l’an passé –son épouse attend très prochainement un second heureux évènement.
Du nouveau, il en aura également à la Diagonale, puisque le parcours a été rallongé de neuf kilomètres (en raison d’un glissement de terrain, le parcours a dû être modifié). « Avec ces 10 km de plus, tout le monde se dira à un moment : “ s’il y avait 10 km de moins, ça serait pas mal, vivement qu’on arrive !“ » sourit-il. « Mais j’aime bien le fait qu’il faille s’adapter, ça permet de penser à autre chose, de partir un peu dans l’inconnu, ça rajoute un peu d’aventure ».
« Possible voire fort probable que je manque d’un petit peu de fraîcheur »
Vainqueur de l’Ultra Trail du Mont Fuji au Japon en avril dernier (lire la news avec les photos ICI) puis de l’UTMB fin août, d’aucuns envisagent une victoire aisée de François D’Haene à La Réunion… « En gagnant l’UTMB, tu te dis pourquoi pas gagner les trois. Il y a cinq ans, quand j’ai attaqué le trail, je mettais trois semaines à me remettre d’une course de 40 km. Effectivement, je vais me donner à fond, mais si on fait toute la course à plusieurs et que je suis cuit à 30 km de l’arrivée parce que je manque de fraîcheur ou j’ai mal partout, ça sera logique et juste humain. Et je ne serais pas déçu à l’arrivée, ça sera un juste retour des choses. C’est possible, voire fort probable que je manque d’un petit peu de fraîcheur et de jus, mais en même temps, ce ne serait pas forcément une contre-performance car je l’aborde justement dans l’optique de voir si je suis capable d’enchaîner. Ce n’est pas comme si c’était un objectif prioritaire de la saison. J’ai fait suffisamment de résultats pour que les gens comprennent que c’est normal si je fais une contre-performance. Et si ça se passe bien, tant mieux, ça sera une belle surprise pour moi » glisse celui qui est coaché par Christophe Malardé, et qui devrait probablement s’adjuger la première édition de l’Ultra Trail World Tour (UTWT). « Ça regroupe des courses qui sont mythiques et très belles. Ce n’était pas l’objectif prioritaire de l’année, mais c’est une motivation supplémentaire. Si je ne réussis pas le challenge, ma saison sera quand même réussie, mais c’est quand même un truc qui n’est pas négligeable ».
« J’ai pris le temps de penser à autre chose »
La clé est la suivante : le physique va-t-il tenir, et aura-t-il assez de fraîcheur mentale après cette saison éprouvante qui l’aura vu aussi terminer 2e des 80 km du Mont-Blanc derrière Luis Alberto Hernando (A revoir ICI), ou s’imposer à l’Ice trail Tarentaise. « Je ne suis pas dans le même état de fraîcheur qu’à l’UTMB® ou en début de saison. J’ai pris le temps de penser à autre chose après l’UTMB®. J’ai fait trois semaines de vendanges, c’était très fatiguant, mais au moins je n’ai pas pensé à la course à pied. Je pense que c’était plutôt bien ».Une manière aussi de débrancher, comme il le raconte dans le dernier numéro de Trails Endurance Mag (Acheter le numéro ICI) où un portrait lui est consacré : François D’Haene s’était octroyé trois semaines de vacances fin juillet-début août, à quelques encablures de l’UTMB®. « Il fallait retrouver cette envie absolument nécessaire en pleine nuit à l’UTMB® » justifiait-il.
Dans la foulée des vendanges sur son domaine du Germain à Saint-Julien (Rhône), il a « bien repris l’entraînement, sans trop de douleur. En un mois et demi, il ne s’est passé des milliards de trucs du point de vue physique. Je suis reparti un peu en montagne. J’ai fait un bon bloc de 10-12 jours début octobre ». Y a-t-il un risque à enchaîner ces deux efforts extrêmes ? « Non je ne pense pas que j’en prenne un. Après, j’espère que pendant la course, je serais capable d’écouter mon corps et de me raisonner s’il y a quoi que ce soit. Mais il n’y a pas de contrecoup. Il faudra en tout cas faire attention cet hiver et prendre le temps de se poser. Presque 900 kilomètres de course en un an, ça ne laisse pas indemne. L’important, c’est d’en avoir conscience » souligne celui qui a mis depuis un an et demi son métier de kiné entre parenthèses, tout en gardant un pied dedans.
« réaliser mes rêves en nature »
De nouvelles aventures, François D’Haene compte bien en vivre l’année prochaine. « J’ai plein d’idées qui viennent, je note un peu tout dans un coin. En novembre-décembre, je vais me poser pour planifier les choses, car j’ai peut-être la possibilité d’aller vers des projets qui me plaisent vraiment et de réaliser mes rêves en nature ». Quelles sont ces rêves ? Il élude. « Ce sont plein de petits projets et destinations qu’on a dans un coin de la tête. J’en parlerai à la fin de l’année. C’est vraiment différent de ce que fait Kilian (Jornet, et les « sommets de (s)a vie »). Chacun a des projets qui s’inscrivent sur plus ou loin long terme. Je voudrais exprimer ce cheminement logique avec plusieurs petites réalisations qui mèneraient ensuite vers l’aboutissement final. Et oui, oui, j’ai besoin de changer d’air après les bons résultats cette année, mais je ferais aussi des ultras ».
Toujours est-il que la notoriété de François D’Haene s’est accrue après son succès haut-savoyard. « Le mois de septembre a très chargé médiatiquement » se marre t-il. « Entre ça et les vendanges, ça n’a pas été évident à gérer tous les jours. Des fois, c’est dur de tout concilier. On est du coup pas forcément agréables avec les bonnes personnes. J’ai quand même essayé de répondre le plus possible à tout le monde. Je vois bien les retombées qu’il y a, les couvertures que j’ai faites. Je suis passé sur L’Equipe 21 dans un reportage derrière des gens comme Julien Absalon. Ça fait plaisir. En plus de mon image, ça permet de présenter vraiment le trail au grand public, de montrer ces notions d’aventure, de plaisir, de montagne, de diversité ».
L’impact de sa victoire à l’UTMB fut bien plus fort qu’en 2012. « Il y avait pas mal de pistes qui étaient en attente et qui n’avançaient pas. Ça permet de donner un petit coup de boost et de relancer la chose ». Alors, qu’en serait-il s’il venait à réaliser le doublé sur la Diagonale des Fous, glanant donc les trois grands ultras sur lesquels il s’est aligné cette année ?
Par Quentin Guillon – © photos Fred Bousseau.
décembre, 2024
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