Antoine Guillon, les secrets d’un ultra-trailer

Antoine Guillon, impressionnant de régularité, a une nouvelle fois bouclé cette saison 2017 en fanfare.
Auteur de sa meilleure saison cette année (7 courses, 4 victoires et 2 podiums) dont une nouvelle deuxième place sur le Grand Antoine GuillonRaid de la Réunion, il a accepté de répondre à nos questions.
On ne naît pas Ultra-Trailer mais certains signes ne trompent pas.
Enfant, Antoine aimait déjà les longues balades et les efforts solitaires en nature. Sa voie vers l’ultra était toute tracée.

Quand il a commencé la course à pied en nature avec son père, la perspective de courir longtemps était déjà sa source de motivation. En 2002, il prend part à la Grande Course des Templier, c’est son premier Trail. « Laisser le chrono de côté et écouter son corps ça m’a tout de suite intéressé ». Il y découvre une nouvelle philosophie de course.
Les échanges avec les autres coureurs, les différentes phases physiques et mentales à gérer, il est piqué…

11ème participation de suite au Grand Raid de La Réunion, et un palmarès hors norme sur cette course ; une 4ème place de 2ème (2010, 2012, 2016 et 2017) pour 1 victoire en 2015, 2 places de 3ème (2007 et 2009), 3 places de 4ème (2008, 2011 et 2013) et une 12ème place en 2014 après le Tor des Géants.

À 47 ans, il ne cesse de progresser et ne se voit pas arrêter si tôt. « Plus on avance en âge, plus on est fort pour analyser et comprendre ». Depuis son premier Ultra-Trail en 2004 lors du Grand Raid Cro-Magnon, il n’a cessé d’enchaîner les performances jusqu’à aujourd’hui.
Photos Antoine Guillon Templiers 2007 avant son 1er Grand raid et 10 ans après pour sa 11ème participation.

Tu as terminé 11 fois le Grand Raid de la Réunion dont 10 fois dans le top 4, qu’est ce qui te motive à prendre part à cette épreuve chaque année ?

Antoine-Guillon-et-David-Pasquio-GRR-2013
A. Guillon et D. Pasquio GRR 2013

Le Grand Raid de la Réunion est une réelle motivation pour moi. Chaque année c’est le point d’orgue de ma saison, l’Ultra-Trail que j’aborde prêt et motivé à 100%. C’est le grand rendez-vous du trail mondial et chaque année il a une saveur particulière.

Dans cette grande fête du trail, on sent que toute l’île est concernée. Il y a plus de 60.000 personnes autour de la course, on croise toujours du monde sur le parcours, c’est quelque chose d’unique. Je décris cette épreuve comme une balade formidable du Sud au Nord. À la Réunion on se sent tout petit face à la nature et humble face aux paysages que l’on traverse.

Chaque édition est un défi, à la fois contre les coureurs que contre soi-même. C’est une épreuve tellement intense au niveau physique et mental qu’il n’y a pas de place pour la lassitude.
L’expérience devient alors un atout supplémentaire, j’ai mes repères et je sais comment gérer ma course.
RETOUR SUR LE GRAND RAID 2017 ICI

À quoi ressemble une semaine dans la peau d’Antoine Guillon ?

Je suis actif 7 jours sur 7, je mélange plusieurs activités. Le matin je consacre 2 à 3h de mon temps pour ce que j’appelle un travail de communication. Je réponds aux sollicitations, principalement celles autour de mon dernier livre (Le plaisir du trail sans contrainte).
En fin de matinée je pars pour une sortie vélo de 1h30 à 3h. Ensuite, je mange avec ma compagne vers 14h.
Je travaille ensuite sur l’organisation des épreuves avec le team Globetrailers puis, à 17 h, je pars courir.
Je fais en moyenne 5 entraînements de trail et de vélo par semaine.

J’aborde l’entraînement de l’Ultra-Trail sous une conception différente. À la différence de certains traileurs, je ne fais pas de vitesse à l’entrainement. Je suis à l’écoute de mon corps et de mes sensations, c’est ce qui dicte les sorties que je souhaite réaliser. J’ai transformé l’entrainement contrainte en entrainement plaisir.

L’Ultra-Trail reste une discipline relativement récente. On a encore beaucoup de progrès à faire dans la gestion technique tel que l’observation, l’écoute du corps et casser les barrières mentales.

« Il faut savoir penser à l’après objectif » : A. Guillon

Certains coureurs sont sujets à des hallucinations pendant leurs Ultra-Trails, as-tu des anecdotes pour nous à ce sujet ?

Les hallucinations sont fréquentes, sur le Tor des Géants en 2014, j’ai eu une première phase avec des confusions. J’avais l’impression de voir des gens sur le côté, sauf qu’en fait c’était des arbres. Il m’est arrivé de voir une énorme grenouille, devoir ralentir à son niveau de peur qu’elle ne saute avant de comprendre qu’il n’y avait rien. J’étais ensuite dans une deuxième phase où je voyais le sol se déplacer, c’était tout de suite plus contraignant pour gérer mes appuis au sol. Je devais monter les genoux pour éviter des rochers imaginaires. Mon allure s’est significativement ralentie. J’ai eu le besoin de faire une pose de 10’ pour dormir et repartir lucide sans hallucinations.

Avec l’expérience, on est conscient que le cerveau, cumulé à la fatigue superpose des images ressemblantes pour former ces hallucinations. Si j’en suis à nouveau victime, il y a une part d’inconscient qui me dit que ce n’est pas vrai. C’est alors un signe qu’il faut se reposer.
Après coup ça forge des expériences et des souvenirs forts.

Quand on est finisher de l’ultra Trail le plus exigeant au monde, quel objectif se donne-t-on pour la suite ?

C’est une bonne question, beaucoup de trailers ont du mal à gérer cette phase post objectif et entrent souvent en dépression. Il faut savoir penser à l’après objectif, se fixer un nouveau projet familial comme partir en vacances.

L’important ce sont ces choses entraînantes à connotation positives pour ne pas se retrouver sans rien ou dans une phase molle. Après chaque Ultra je me concentre sur de nouveaux challenges comme l’organisation de stages ou la préparation du prochain.

Parmi les courses qui me font rêver, j’aimerais faire un jour le Spartathlon qui relie Athènes à Sparte car c’est une course unique et mythique. Je n’ai pas encore trouvé comment l’intégrer dans la saison, ça reste une course de 246 km à 3 semaines de la Diagonale des Fous. Mais j’y prendrai part, celle-ci me tient à cœur…

Tu es également à l’initiative du challenge Ultra Mountain National Tour dont le Grand Raid 6666 que tu organises, peux-tu nous en dire plus ?

J’ai créé le Grand Raid 6666 dans l’objectif de faire découvrir le massif du Caroux dans l’arrière-pays Héraultais, là où je vis et m’entraîne. Le trail traverse des paysages qui ressemblent à la réunion.
Je souhaite faire partager mon idée du trail, amener les coureurs à être au contact de la nature.

Le challenge est quant à lui une invitation à découvrir les différentes variétés de notre territoire. Il est composé de 9 courses d’au moins 100km et 6000m de positif. Nous fonctionnons sous un format associatif, tout est fait pour les coureurs, c’est bien de leur offrir de belles aventures à travers une organisation familiale. On a à cœur de valoriser le territoire et des épreuves qui méritent d’être connues car orientées coureur. On en a besoin aujourd’hui.

Pour en savoir plus Antoine Guillon

Résultats 2017 :

• 19 Octobre : 2ème du Grand Raid De La Réunion 164.9km / 10000m+
• 30 Août : 2ème TDS 119.2km / 7100m+
• 07 Juillet : 1er de l’Andorra Ronda Dels Cims 170km / 13500m+
• 19 Mai : 1er du Cami De Cavalls Compressport Trail Menorca 180.6km / 2175m+
• 22 Avril : 1er du Madeira Island Ultra Trail 81.9km / 4800m+
• 24 Février : 24ème de la Trans Gc Transgrancanaria 123.7km / 6800m+
• 20 Janvier : 1er de l’Ultra-Trail D’Angkor 128km / 1025m+

Retour sur la victoire d’Antoine Guillon au Grand Raid 2015

Par Paul Mathou – ©Fred Bousseau – Luka Garcia & JP Vidot (Grand Raid).

Antoine Guillon - diagonale des Fous 2017 - Fred Bousseau

décembre, 2024

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