Pour sa troisième participation après deux abandons, Emmanuel Meyssat a décroché à 36 ans sa première Saintélyon. Chez les femmes, Juliette Benedicto, 30 ans, a elle aussi apposé pour la première fois au nom de la classique (et du premier coup, elle avait simplement disputé le relais, sur la dernière portion du parcours, il y a quatre ans), quelques petites secondes devant Sylvaine Cussot.
Quatre heures bien tassés. L’incertitude régnait dans l’aire d’arrivée. Car, à Soucieu en Jarrest, à vingt bornes de l’arrivée, Emmanuel Meyssat était ressorti du ravito avec une petite dizaine de secondes d’avance sur Sébastien Spehler, qui avait dynamité la course dès le départ. Puis au dernier pointage avant l’arrivée, à Chanopost (dix kilomètres environ du but), celui qui avait terminé au pied du podium aux Templiers fin octobre disparaissait des écrans radars.
Abandon ou souci de chrono ? Et si un nouveau duo franchissait de concert la ligne d’arrivée, dans le sillage de Benoit Cori et Nicolas Martin l’an passé ?
Mais c’est bien Emmanuel Meyssat qui arriva en tête à la halle Tony Garnier, coupant la ligne en 5h17’27’’. « C’est une course qui m’a toujours fait un peu rêvé. Être sur la première marche du podium est vraiment un aboutissement » confia le local de l’étape, qui connaît presque par cœur le parcours.
Emmanuel Meyssat : « Je ne l’avais pas coché »
Là, le sociétaire de l’Athletic Club Tassin a d’abord construit sa victoire sur la patience, pointant ainsi en 6e position au premier temps intermédiaire à St-Christo, à près de 3’ de Sébastien Spehler. « J’ai commencé à remonter à partir du 40e. Tony Moulai a sauté un peu avant Soucieu (il finira finalement 5e). Je n’étais plus qu’à vingt secondes de Spehler (qui abandonnera) à ce moment-là mais je ne l’avais pas vu avant. Je me suis dit qu’il y avait un coup à jouer. Je suis passé devant à Soucieu, sans trop m’en rendre compte. Puis je n’ai revu personne, je n’avais aucune idée des pointages sur l’arrière » expliquait celui…qui n’avait pas « même pas coché » la Saintélyon à son programme !
« J’avais presque prévu de couper ma saison en octobre. Je fais d’habitude une coupure hivernale, je ne l’ai pas fait l’an dernier là car je sortais de blessure. Je me disais que j’allais couper car ça faisait du coup un an et demi que je ne l’avais pas fait. J’ai tellement été surpris par mes bonnes sensations fin septembre – début octobre que je me suis dis qu’il fallait pourquoi pas tenter ».
Pari gagnant donc pour Emmanuel Meyssat, qui élargit sa palette avec ce succès sur 70 bornes, lui qui est accoutumé à briller sur des formats plus courts – témoin son titre de champion de France sur le court en 2011, ses sélections internationales en courses en montagne ou ses probants résultats dans les labours sur le cross court.
De son côté, Alexandre Mayer, 3e surprise en 2013, puis 4e il y a deux ans, a réalisé une très grosse remontée pour monter sur la deuxième marche du podium, à moins de deux minutes de la victoire. Peut-être pour l’an prochain ?
Sylvaine Cussot : « C’est une guerrière ! Moi, la bagarre, ce n’est pas trop mon truc »
A l’instar de la course masculine, l’épreuve féminine a également été marquée du sceau du suspense. Sur les coups de six heures du matin, qui de Juliette Benedicto, qui avait presque constamment mené les débats, ou de Sylvaine Cussot, partie plus prudemment (6e à 6’05’’ à Sainte-Catherine) mais seulement pointée à vingt secondes au dernier ravitaillement, à une dizaine de kilomètres de l’arrivée, allait s’imposer halle Tony Garnier ?
Pour à peine une trentaine de secondes, c’est finalement la première qui s’adjugea cette 63e édition, explosant de joie en franchissant la ligne. Qu’est ce qui a fait la différence entre les deux femmes ? « Mentalement, tu es peut-être un peu plus forte que moi » admettait Sylvaine Cussot en devisant quelques minutes après la course avec la lauréate du trail du Ventoux en 2014 et deuxième des Templiers cette année-là. « C’est une guerrière ! Moi, la bagarre, ce n’est pas trop mon truc » poursuivait Sylvaine Cussot, victorieuse de l’Ecotrail de Paris en avril et qui truste les podiums sur la Saintélyon (3e en 2013, 2e en 2014).
« Ah oui, j’aime la compétition » souriait en écho Juliette Benedicto. « J’étais dans mon rythme je me suis dit que j’allais finir comme ça, niquel. Puis Sylvaine m’a rattrapé vers le 40e et on s’est tirées la bourre jusqu’à la fin. Mais je ne pensais pas tenir parce qu’elle est passée vite. J’ai bu, mangé un truc et c’est reparti. Ça a été au chat et à la souris pendant les quinze derniers kilomètres. On était à quinze à l’heure sur le plat, on était à fond » racontait l’athlète de trente ans, qui se relance après un an et demi difficile consécutif à une blessure contractée lors des Mondiaux en 2015 à Annecy.
Juliette Benedicto relancée par le triathlon
« Je m’étais déchirée l’ischio et j’ai mis super longtemps à m’en remettre. Du coup je suis passée sur les triathlons. Avec le vélo et la natation, j’arrivais à m’en sortir » expliquait la 6e du très difficile Embrunman mi-août (un peu plus de 11 heures d’effort).
« Comme j’ai fait une bonne saison de triathlon et que je n’étais toujours pas blessée -ouf !-, je me suis décidée à faire la Saintélyon le mois dernier, d’autant que le parcours roulant me convenait. C’est génial de gagner, ça montre que je peux quand même continuer à faire du trail. C’est vrai qu’au départ, je ne savais pas du tout à quel niveau j’allais finir ».
De son côté, Sylvaine Cussot a passé la ligne « super émue. Je voulais faire du mieux possible pour mon papa. Il vient tous les ans et il est cette année à l’hôpital. J’ai pensé à lui du début à la fin. Je n’ai rien lâché pour lui. Juliette était plus forte, et je suis quand même contente de moi. Je ne pouvais pas faire mieux ».
Mélanie Rousset et Benoit Charles-Mangeon ont complété les podiums, à environ un quart d’heure des deux duo de tête.
Les résultats :
Hommes :
- Emmanuel Meyssat, 5h17’27’’ ; 2. Alexandre Mayer, 5h18’59’’ ; 3. Benoit Charles-Mangeon, 5h31’34’’ ; 4. Emmanuel Gault, 5h33’57’’ ; 5. Tony Moulai, 5h38h’15’’.
Femmes :
- Juliette Benedicto, 6h35’36’’ ; 2. Sylvaine Cussot, 6h36’13’’ ; 3. Mélanie Rousset, 6h52’13’’ ; 4. Lucie Jamsin, 7h07’56’’ ; 5. Céline Carrez, 7h08’20’’.
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Texte : Quentin Guillon
Photos : Gilles Reboisson.
novembre, 2024
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