La diffusion du film de Sandrine Mörch, “Brice, le vacher à l’assaut des Pyrénées”, le 28 janvier 2017 sur Arte, est l’occasion de présenter le portrait d’un homme atypique, paysan et coureur en montagne….Brice Delsouiller.
Il n’est pas le seul bien sûr, Thomas Vericel, Yann Mondot, Michel Rabat, Baptiste Cazaux ou encore Fiona Porte ont eu, et on encore, ce lien à la terre et à la paysannerie avec des valeurs fortes comme le courage, la souffrance, la joie, le bon sens…
Trails Endurance Mag consacrera dans son prochain numéro (#122) un dossier spécial sur les paysans coureurs dans le cadre de la diffusion de ce film – voir le teaser de présentation ICI.
la métaphysique du pâtre volant (sous titre du film)
Courir derrière ses vaches 5 mois de l’année à travers les estives d’Ariège lui a forgé un physique et un mental de champion. Aujourd’hui, Brice Delsouiller se rapproche pas à pas des meilleurs mondiaux sur les courses de montagne. Tous sont connus, sponsorisés, identifiés sur internet, habillés, « marqués ».
Brice, lui, court dans des baskets usagées et n’est joignable qu’à sa cabane d’altitude, à la nuit tombée. Pas de portable, pas de site internet, pas de communication. Il a choisi le silence, l’espace et le temps pour compagnie.
En alliant sport de haut niveau et pastoralisme, il défend un métier, et la montagne Ariègeoise.
Entre 2 000 et 3 000 mètres, de mai à octobre, il garde près de 400 vaches.
Levé à 5h, couché à 22h, il galope du matin au soir. Des que ses Gasconnes lui laissent un peu de répit, il bascule dans l’entrainement intensif, escalade des pics, dévale des précipices. L’estive est peu à peu devenue son champ d’entrainement. Exigeant à l’extrême, et jamais plat. En fin de saison, il a couru tant de dénivelés qu’il a des mollets d’acier et un cœur résistant à toute épreuve.
…..fou, heureux, simple, sain, philosophe et poète.
La montagne lui a enseigné l’adversité, le risque, le défi. Et puis la lumière, les orages, les premières neiges. ..Quand il évoque l’aube et ses brouillards, les paysages à couper le souffle, le sanglier débusqué qui court, comme lui, le froid qui mord jusque dans son lit, c’est du Giono palpable.
Il est la montagne aux forceps, quand il y lance son corps comme un fou furieux. Il est la montagne ludique, quand il s’amuse comme un gosse de ses prises de risques dans son immense terrain de jeu.
Il est la montagne spirituelle, et chaque pas affute sa pensée. Il est fou, heureux, simple, sain, philosophe et poète.
Il cherche et cherche encore…Nouvelles voies, nouvelles pistes, nouveaux défis, nouveaux sommets, nouvelles victoires sur lui-même, nouveaux horizons pour ses yeux et son cerveau.
1/ Titre du film :
Brice, le vacher à l’assaut des Pyrénées
Sous-titre : la métaphysique du pâtre volant
2/ Auteurs :
Sandrine Mörch, journaliste-réalisatrice
Jérôme Prudent, monteur-réalisateur
Christophe Picot, cameraman
3/ Longueur : 52 mn
4/ Calendrier diffusion:
Le samedi 28 janvier à 20h sur Arte, première diffusion du 42’ (version raccourcie)
Le 4 février, vers 8h, sur Arte, première diffusion du 52’
Puis multitude de rediffusions en Europe
5/ Biographie:
Brice est le quatrième film d’une collection pyrénéenne:
Le curé des cimes, Yvonne la bergère, La double vie de Jeannot et Brice, le vacher à l’assaut des Pyrénées.
Tous disponibles en DVD
Crédits Photos : Igor Bertrand
Les mots de Sandrine Mörch :
J’ai découvert Brice au cours d’une transhumance que nous tournions pour France 3.
A 2 000 m d’altitude sur l’estive de Luzenac. Ses premières paroles, dans sa cabane de pâtre, me sont restées en tête : ses choix de vivre en haut, et de s’isoler d’un monde qui ne l’intéressait pas. Sans portable ni ordinateur, loin des décors de béton. Et sans être un anachorète pour autant. Il a un père intello avec qui il partage ses bêtes et l’entretien de la ferme. Il avait une mère artiste. Il vit avec sa compagne, en bas, les 7 mois en dehors de l’estive. Là, il va aussi au cinéma, au concert, au restaurant…Et s’il passe 5 mois en estive, à 2000 mètres et dans une cabane rudimentaire, c’est parce que c’est son biotope, au-delà de son gagne pain. Il aime son métier, il aime les vaches. Tout son corps se fond dans la nature. C’est le vent qui l’alerte, le soleil qui l’énergétise, l’herbe qui le porte, la beauté qui le guide. Peu de paysans jusqu’à ce jour se sont exprimés. Alors qu’ils connaissent cet univers que les urbains ne peuvent que subodorer, avec une nostalgie atavique. Tous ces paysans, qui de génération en génération ont travaillé cette terre sans jamais en parler.. Brice, lui, en parlait magnifiquement.
J’ai eu envie de porter cette parole en bas. Chez lui, le respect de la nature et du vivant, c’était du concret. En habitant cette autre planète, qui me paraissait bien plus terre ferme que la notre, Brice incarnait une solution avec la nature. Tout en ayant les ingrédients d’un vrai homme moderne.
“Il est une utopie réaliste”
Et puis j’ai trouvé que ses courses à travers la montagne étaient un formidable hameçon pour parler aux urbains. Le trail devenait tendance. Brice le vivait à la manière d’un cheval sauvage lancé au galop dans l’espace qu’il s’accordait. Une ode au corps qui freine, qui grimpe, qui grandit, qui revit, qui jubile. En pleine liberté.
J’ai voulu insuffler de sa légèreté au monde d’en bas, tellement plombé, tellement inquiet. Partager son apesanteur.
Ce film nous donne des ailes, il réhabilite l’homme-animal, il donne du sens tout en épinglant le non-sens, Il donne à réfléchir sur nos propres choix de vie. Il montre que l’excellence vient du terrain; que la liberté c’est dehors; que le pastoralisme c’est l’avenir de la montagne, que la montagne, c’est le dernier refuge, le no-limite, l’espace vierge, la dureté, le défi, et la beauté. Brice incarne cela de manière vivante et non théorique. Il est une utopie réaliste.
J’invite le téléspectateur, en somme, à quelques ruminations !
Brice Delsouiller est soutenu par le magasin La Cordée à Gavarnie – Cauterets (65)
novembre, 2024
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